La conviction de l’origine divine de l’Écriture ne vient pas de la Réforme, mais remonte aux Pères apostoliques et aux Pères de l’Église, qui affirmaient déjà que la Bible est la Parole de Dieu, inspirée par l’Esprit Saint.
Voici une sélection de citations patristiques, classées chronologiquement et accompagnées d’un bref commentaire théologique.
1. Clément de Rome († vers 97)
« Regardons attentivement les Écritures, qui sont les vraies paroles du Saint-Esprit. »
— 1 Clément 45.2
Déjà à la fin du Ier siècle, Clément — contemporain des apôtres — identifie directement les Écritures avec les paroles du Saint-Esprit. Il n’y a pas de distinction entre “inspiré” et “divin” : pour lui, lire l’Écriture, c’est entendre Dieu.
2. Justin Martyr († vers 165)
« Nous avons appris des prophètes et de Jésus-Christ lui-même que les Écritures ne sont pas des œuvres humaines, mais qu’elles ont été écrites par l’inspiration divine. »
— Dialogue avec Tryphon, ch. 7
Justin souligne que les prophètes n’étaient pas des “auteurs” ordinaires : ils furent inspirés (en grec theopneustoi).
C’est une formulation très proche de 2 Timothée 3.16 — preuve que le concept d’inspiration plénière était déjà enraciné dans la théologie du IIe siècle.
3. Irénée de Lyon († vers 202)
« Les Écritures sont parfaites, puisque ce sont les paroles de Dieu et de son Esprit. »
— Contre les Hérésies, II.28.2
Irénée lie la perfection des Écritures à leur origine divine : elles sont parfaites non pas dans le style ou les détails, mais parce qu’elles viennent du Dieu parfait.
Cela fonde une conception infaillible et normative de la Bible, contre les gnostiques qui en rejetaient des parties.
4. Origène († vers 254)
« Les Écritures ont été écrites sous l’inspiration du Saint-Esprit et contiennent des trésors infinis. »
— Homélies sur Lévitique, I.1
« Les Évangiles ont été écrits par l’Esprit Saint, et aucun mot n’y est sans signification. »
— Homélies sur Luc, I.1
Même si Origène développe une interprétation spirituelle complexe, il reste profondément attaché à la conviction que Dieu parle dans chaque mot du texte biblique.
Il fonde ainsi une exégèse spirituelle sur une inspiration littérale préalable.
5. Athanase d’Alexandrie († 373)
« Les saintes Écritures, inspirées par Dieu, sont suffisantes pour l’annonce de la vérité. »
— Contre les païens, I.3
Athanase affirme ici la suffisance et la théopneustie de la Bible : c’est à la fois une défense de l’inspiration et une anticipation du Sola Scriptura.
Il ajoute ailleurs :
« Ce sont des fleuves qui apportent la vie éternelle, car ce sont les paroles mêmes de Dieu. »
6. Basile de Césarée († 379)
« Nous devons croire que toute Écriture est inspirée par Dieu, et utile, selon la parole de l’Apôtre. »
— Sur le Saint-Esprit, ch. 21
« Il n’est pas permis de rejeter un seul mot des Écritures, car l’Esprit Saint les a toutes prononcées. »
— Homélie sur la foi, 1
Basile cite explicitement 2 Timothée 3.16, soulignant l’universalité de l’inspiration : “toute Écriture”, et non seulement les passages doctrinaux.
7. Jean Chrysostome († 407)
« Ce ne sont pas des hommes qui parlent dans les Évangiles, mais le Saint-Esprit même de Dieu. »
— Homélie sur Matthieu, 1
« Quand tu entends lire les Écritures, ne pense pas que ce soit un homme qui te parle : c’est Dieu qui t’adresse la parole. »
— Homélies sur Jean, 2
Chrysostome insiste sur la dimension orale de l’inspiration : lire l’Écriture dans l’assemblée, c’est entendre Dieu parler au présent.
8. Jérôme († 420)
« Je crois fermement que l’Évangile et les Écritures sont les paroles de Dieu ; il ne peut y avoir en elles ni erreur ni contradiction. »
— Lettre à Damasus, 15.1
« Ce que nous lisons dans l’Écriture, le Saint-Esprit l’a dicté. »
— Préface aux Évangiles
Jérôme formule ici ce qui deviendra la formule classique de l’inerrance dans le catholicisme médiéval : “dictées par le Saint-Esprit”.
Il n’entend pas par là une dictée mécanique, mais une autorité absolue et divine du texte.
9. Augustin d’Hippone († 430)
« J’ai appris à accorder à ces livres une telle vénération et un tel respect, que je crois fermement qu’aucun de leurs auteurs n’a commis d’erreur en écrivant. »
— Lettre à Jérôme, 82.3
« Les Écritures, qui sont parvenues jusqu’à nous de la main des prophètes et des apôtres, ont été écrites par l’Esprit de Dieu lui-même. »
— De la Doctrine chrétienne, II.8.12
Augustin établit la doctrine la plus nette de l’inerrance biblique avant la Réforme.
Pour lui, toute erreur apparente vient soit d’un copiste, soit d’une mauvaise interprétation, mais jamais du texte inspiré lui-même.
10. Grégoire le Grand († 604)
« Les paroles du Seigneur sont des paroles pures, comme l’argent éprouvé par le feu. »
— Morales sur Job, Préface, 1
« C’est l’Esprit Saint qui a écrit les Écritures : quand nous les lisons, c’est Dieu que nous écoutons. »
— Homélies sur Ézéchiel, I.7
Grégoire clôt l’ère patristique en réaffirmant que l’Esprit Saint est l’auteur réel du texte biblique, garantissant sa pureté et son autorité.
Synthèse doctrinale patristique
Thème | Témoins patristiques | Formulation centrale |
---|---|---|
Origine divine | Clément, Justin, Irénée, Athanase | Les Écritures viennent de Dieu et non des hommes. |
Inspiration du Saint-Esprit | Origène, Basile, Chrysostome, Jérôme | Le Saint-Esprit parle à travers les auteurs. |
Inerrance et perfection | Irénée, Jérôme, Augustin | La Parole de Dieu ne peut contenir d’erreur. |
Suffisance et autorité | Athanase, Augustin, Grégoire | Les Écritures sont suffisantes pour la foi et la vérité. |
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