Marc 13.33-37 : « Veillez ! » – Vincent Bru (prédication)

Marc 13.33‭-‬37 : « Veillez ! »
Dimanche 3 décembre 2023
1er dimanche de l’Avent
Autres lectures : Esaïe 63.16b-17, 19b ; 64.2b-7 ; 1 Corinthiens 1,3-9

Nous sommes invités aujourd’hui à entrer dans la période dite de l’Avent, qui ouvre une nouvelle année liturgique.

Avec le temps de l’Avent nous entrons dans une nouvelle année, qui n’est pas celle du calendrier civil, mais du calendrier liturgique qui retrace les grandes étapes de l’histoire du Salut.

Le temps de l’Avent, du latin adventus, qui signifie « venue, avènement », s’ouvre avec le 4ème dimanche qui précède Noël.
C’est une période durant laquelle le peuple de Dieu est appelé à se préparer intérieurement à célébrer Noël.

Ce qu’il nous faut avoir en vue avec cette période de l’Avent c’est le mystère de la nativité : événement inouï, et décisif pour l’humanité, puisque Dieu s’est fait homme parmi les hommes ; de sa naissance à sa mort sur la Croix, il a partagé en tout, la condition humaine, à l’exception du péché.

Chacun est donc invité plus particulièrement, durant cette période à la vigilance et au changement de vie : la parole des prophètes, qui retentit chaque dimanche de l’Avent, redit la nécessité de la conversion et de la préparation du cœur, comme le rappellent également les autres lectures qui nous sont proposée tout au long de cette période.

Ainsi, l’Avent, comme l’ensemble du calendrier liturgique, aide les fidèles à revivre les grands événements de la vie et de l’enseignement du Christ, en particulier de sa naissance (Noël) à sa Résurrection (Pâques). Il s’agit de revivre au plus profond de soi-même et jusqu’au cœur tous ces grands événements de l’histoire du salut dans « l’aujourd’hui », l’ici et le maintenant de la liturgie du culte.


Alors je vous lis donc maintenant le texte de ma prédication de ce matin, qui se trouve dans l’évangile de Marc au chapitre 13, les versets 33 à 37 :

« Prenez garde, veillez (et prier) – certains manuscrits disent « veillez et prier » là où d’autres disent seulement « veillez » -, car vous ne savez quand ce sera le moment. Il en sera comme d’un homme qui part en voyage, laisse sa maison, donne pouvoir à ses serviteurs, à chacun sa tâche, et commande au portier de veiller. Veillez donc, car vous ne savez quand viendra le maître de la maison, le soir, ou au milieu de la nuit, ou au chant du coq, ou le matin ; craignez qu’il n’arrive à l’improviste et ne vous trouve endormis. Ce que je vous dis, je le dis à tous : Veillez. »

Dans le passage qui précède tout juste celui-ci, Jésus vient de parler à ses disciples de ce qu’il appelle « la venue du Fils de l’homme » et il a ajouté « Pour ce qui est du jour ou de l’heure, personne ne les connaît, pas même les anges dans le ciel, pas même le Fils, mais le Père (seul). » (Mc 13.32)

Cette expression de « la venue du Fils de l’homme » fait référence à la fois au jugement de Dieu sur Israël avec la chute de Jérusalem en 70 par l’armée de Titus, comme aussi, par delà cet évènement au retour en gloire de Jésus-Christ au moment de la Parousie, et du Jugement dernier.

L’INATTENDU DU RETOUR DE JESUS-CHRIST, LE MAITRE DE LA MAISON

Ainsi, le Seigneur avertit solennellement ses disciples sur le caractère inattendu et imprévisible de sa venue.

L’argument est le suivant : si lui, le Fils, dans son humanité – parce qu’il va de soi que dans sa divinité il sait tout, il est omniscient, puisqu’il est Dieu -, si donc dans son humanité, il ne connaît pas le jour de sa venue, alors c’est que forcément, nous le connaissons encore moins, et que nous n’avons absolument aucun moyen de le connaître.

Et donc, il ajoute : « Prenez garde, veillez – au sens de « restez éveillés » -, car vous ne savez pas quand ce sera le moment ».

Et Jésus de rajouter : « le soir, ou au milieu de la nuit, ou au chant du coq, ou le matin » (verset 35).

Il faut s’arrêter un instant sur les mots « au chant du coq » : il s’agit très probablement d’une allusion au reniement de Pierre. On sait en effet que Marc était très proche de Pierre, et il faut voir dans cette phrase une mise en garde. Au fond, c’est comme si Jésus disait : « Si vous n’êtes pas attentifs à chaque instant, à chaque heure, au jour le jour, si vous ne veillez pas, alors il peut vous arriver, tout comme à Pierre, de me renier sans même y prendre garde. »

LA TENTATION

Quelques heures avant le reniement de Pierre, Jésus, dans le jardin de Gethsémani, avait dit aux trois apôtres qui l’accompagnaient : « Veillez et priez afin de ne pas entrer en tentation » (Mc 14.38). Et il avait ajouté : « L’esprit est bien disposé, mais la chair est faible »

Comment ne pas penser ici aux paroles du Notre Père : « Ne nous laisse pas succomber à la tentation » ?

J’ouvre ici une parenthèse. Longtemps nous avons récité la prière du Seigneur, avec les mots : « Ne nous soumets pas à la tentation ». Depuis quelques temps l’Église romaine catholique a jugé plus opportun, à tort ou à raison, de traduire plutôt cette demande par les mots suivants : « Ne nous laisse pas entrer en tentation » ?

Personnellement, sur ce point précis, je suis d’accord avec les catholiques traditionalistes qui estiment que la meilleure traduction possible c’est l’ancienne formule : « Ne nous laisse pas succomber à la tentation ». Parce que c’est précisément là le sens de la formule que l’on connaît, celle d’avant ce changement : « Ne nous soumets pas à la tentation ».

Nul ne saurait, en effet, échapper à la tentation : cela fait partie de notre condition humaine. Mais l’important c’est de savoir de façon certaine que rien de ce qui nous arrive ici-bas n’échappe à la souveraineté de Dieu et à sa providence. Calvin dit dans un passage connu de l’Institution de la Religion Chrétienne que « les évènements quels qu’ils soient relèvent de la providence de Dieu ».

L’important donc, ce n’est pas d’échapper à la tentation, puisque Jésus lui-même a été tenté dans le désert pendant 40 jours et 40 nuits…
L’important c’est de ne pas succomber à la tentation, et c’est précisément ce que nous devons demander à Dieu dans notre prière et donc dans le Notre Père.

Nous sommes tous des pécheurs, alors forcément nous devons être tentés, et nous le sommes, parce que la tentation vient de notre vielle nature, de notre nature pécheresse, et nous devons apprendre à vivre avec.

Vous connaissez le mot de Luther : « J’ai cherché à noyer ma vielle nature, mon viel homme, mais j’ai compris qu’il savait nager » !

Notre nature pécheresse sait nager ! Nous ne pouvons pas la noyer tout-à-fait, et tout ce que nous pouvons faire c’est de lutter contre nos inclinations pécheresses, afin de ne pas succomber à la tentation, et c’est bien là ce que nous demandons à Dieu.

VEILLEZ ET PRIEZ !

Afin de ne pas succomber à la tentation il nous faut donc veiller, et il nous faut prier, et prier sans cesse.

Veiller c’est prier et prier c’est veiller ! Prier pour rester attentif aux exigences du royaume et pour nous y conformer, et nous y confirmer. Prier pour que le Saint-Esprit nous aide à marcher d’une manière digne de Dieu, et afin que nous ayons toujours de l’huile dans nos lampes, autrement elles deviendraient inutiles. Prier aussi pour que Dieu nous aide à faire fructifier les biens qu’il nous a confiés, comme dans la parabole des talents. Prier toujours, et ne pas hésiter à demander à Dieu ce dont nous avons besoin, ou plus exactement ce dont il nous dit que nous avons besoin.

Luc 11.9‭-‬13 :
« Et moi, je vous dis : Demandez et l’on vous donnera ; cherchez, et vous trouverez ; frappez, et l’on vous ouvrira. Car quiconque demande reçoit, celui qui cherche trouve, et à celui qui frappe on ouvrira. Quel père parmi vous, si son fils lui demande du pain, lui donnera une pierre ? ou (s’il lui demande) du poisson, lui donnera-t-il un serpent au lieu d’un poisson ? Ou s’il demande un œuf, lui donnera-t-il un scorpion ? Si donc, vous qui êtes mauvais, vous savez donner de bonnes choses à vos enfants, à combien plus forte raison le Père céleste donnera-t-il l’Esprit Saint à ceux qui le lui demandent. »

PRENDRE SOIN DE LA MAISON

Revenons à notre texte :
33Prenez garde, veillez (et priez), car vous ne savez quand ce sera le moment. 34Il en sera comme d’un homme qui part en voyage, laisse sa maison, donne pouvoir à ses serviteurs, à chacun sa tâche, et commande au portier de veiller.

La suite du texte nous éclaire sur ce en quoi consiste la tentation. Dans le texte d’aujourd’hui, Jésus se compare à un maître de maison qui part en voyage : « Il a laissé sa maison, confié à ses serviteurs l’autorité, à chacun sa tâche, et il a donné au portier l’ordre de veiller. »

La tentation, en quelque sorte, c’est de dormir, c’est-à-dire de négliger la maison. Car il faut s’occuper de la maison, c’est-à-dire de l’Église, en l’absence du maître ! Et il faut se tenir devant la porte, pour guetter le retour du maître.

Il faut se souvenir que l’on est tout à la fin de l’évangile de Marc, à quelques jours de la fête de la Pâque, c’est-à-dire juste avant la Passion. Jésus-Christ sait qu’il va bientôt quitter ce monde pour retourner vers son Père, quitter donc la maison, le royaume, l’Église qu’il va confier à ses disciples, qui vont devoir en prendre soin.

Dans l’Évangile de Matthieu nous avons vu à travers la parabole des talents qu’il nous fallait faire fructifier les dons de Dieu en nous, en œuvrant activement pour le royaume.

La parabole des dix vierges nous avertit sur la nécessité de toujours entretenir la flamme de l’amour de Dieu en nous et de jamais nous décourager, et de ne pas nous endormir, par lassitude ou par ennui, ou découragement.

La parabole des brebis et des boucs nous alerte sur l’urgence de l’évangélisation des nations et sur l’importance de prendre soin de la maison de Dieu, de l’Église, car ce que nous faisons au plus petit des frères de Jésus, c’est-à-dire aux disciples, c’est à lui, Jésus, que nous le faisons.

Et voilà que notre texte de ce matin nous parle aussi de cette maison et de la nécessité d’en prendre soin.

Notez bien l’expression : Il a « fixé à chacun son travail ». Cela veut dire que chacun d’entre nous a un rôle à jouer, son rôle. Et un rôle efficace puisqu’en partant « il a donné tout pouvoir à ses serviteurs » !

LE PORTIER DE LA MAISON

Notez en particulier le rôle du portier qui se tient devant la porte… Chacun a un rôle à jouer mais il n’y a qu’un seul portier !

Ne devons-nous pas voir ici en particulier le rôle des pasteurs et des anciens dans l’Église qui doivent veiller à la bonne doctrine ainsi qu’à la discipline ecclésiastique ? Ne pas laisser rentrer dans la maison de Dieu les loups ravisseurs !

Jésus a dit : « Je suis la porte » !

Solus Christus ! disaient les Réformateurs !

On ne peut rentrer dans l’Église que par lui, le Christ, le seul Médiateur entre Dieu et les hommes.

Il faut voir ici un avertissement contre les fausses doctrines, les faux prophètes, les faux évangiles.

Je pense à cette parole de Chesterton qui dit : « On ne veut pas d’une Église qui suive le monde. Nous voulons d’une Église qui entraine le monde » !

Le rôle du portier c’est de veiller à ce que la maison du Seigneur reste la maison du Seigneur, une maison de prières, et non pas une caverne de voleurs, pour reprendre les propos de Jésus dans l’épisode où il chasse les vendeurs du temple…

L’Église n’est pas le monde, et le monde n’est pas l’Église. L’Église est dans le monde, mais comme un signe de rupture par rapport à l’humanité pécheresse en Adam. Appel à la conversion ! La repentance n’est pas une option !

CONCLUSION

En conclusion je dirai ceci.

Le Seigneur nous appelle durant cette période de l’Avent à être à la fois des veilleurs et des portiers de sa maison dans un monde en proie au mal, au péché, à l’incrédulité, à la désobéissance.

Il nous demande de veiller oui, et de prier, de prier en veillant afin de ne pas succomber à la tentation de l’incrédulité, du découragement, de la désobéissance, de la paresse.

Cela suppose, évidemment, que nous n’attendions pas l’avènement du royaume de Dieu comme on attend le train, mais que notre attente soit active !

Mais notre problème, justement, c’est que, bien souvent, nous restons passifs, ou pire, nous oublions que nous attendons quelque chose, ou plutôt quelqu’un !
Et alors, nous occupons le temps à autre chose… Mais occuper le temps à autre chose, quand il s’agit du royaume de Dieu, évidemment, c’est grave. Et c’est pour cela que le Christ nous met en garde.

Comme nous l’avons vu avec la parabole des talents, le maître de maison nous fait confiance, il nous confie ses trésors, alors la seule réponse digne de l’honneur qu’il nous fait consiste à lui faire confiance en retour, à nous retrousser les manches, et à œuvrer activement pour son royaume, en étant des témoins de son amour et de sa vie !

Amen !

Pasteur Vincent Bru


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