Proposition complète fondée sur le dimanche 23 novembre 2025, qui correspond dans la plupart des traditions réformées et liturgiques au Dimanche du Christ-Roi (ou « Règne du Christ »), dernier dimanche de l’année liturgique.
Le Dimanche du Christ-Roi célèbre la souveraineté de Jésus, révélée dans Jean 18 : un Royaume qui ne vient pas du monde, mais qui éclaire et transforme le nôtre. Cette page propose une exégèse approfondie, une liturgie complète, des références aux Pères de l’Église et aux Réformateurs, ainsi que des applications pratiques pour aujourd’hui.
Le dimanche du Christ-Roi, et plus largement pour célébrer la royauté du Christ (Jean 18), la couleur liturgique traditionnelle est :
Blanc (ou or).
Cette couleur symbolise :
– la gloire du Christ
– la victoire
– la lumière
– la souveraineté divine
– la joie eschatologique du Royaume
Elle est utilisée pour les grandes fêtes du Seigneur : Noël, Pâques, Ascension, Trinité… Et Christ-Roi, qui clôt l’année liturgique par l’affirmation du règne éternel du Christ.
Lectures du jour
2 Samuel 23.1–7
Psaume 93 (ou Psaume 132.1–12)
Apocalypse 1.4–8
Jean 18.33–37
Résumé des lectures
2 Samuel 23.1–7
Dernières paroles de David : il affirme que sa royauté n’existe que parce que Dieu l’a établie. Le vrai roi est celui qui gouverne selon la justice divine. Le mal, lui, finit consumé comme des épines jetées au feu.
Psaume 93
Le Seigneur est roi : il est revêtu de majesté. Les flots peuvent gronder, mais Dieu demeure plus puissant que tous les chaos du monde.
Apocalypse 1.4–8
Jésus-Christ est « le témoin fidèle, le premier-né d’entre les morts et le prince des rois de la terre ». Il vient, il jugera, il règne, il est l’Alpha et l’Oméga.
Jean 18.33–37
Jésus confronte Pilate : « Mon royaume n’est pas de ce monde. » Son autorité repose sur la vérité que Dieu révèle, non sur la force des armes humaines.
Exégèse sommaire
2 Samuel 23
Le texte insiste sur l’alliance de Dieu avec David. Le roi légitime est celui qui gouverne « dans la crainte de Dieu ». L’image de la lumière du matin souligne la bénédiction d’un pouvoir juste.
Psaume 93
Le vocabulaire insiste sur la stabilité : « Le monde est ferme. » En hébreu, le verbe kun évoque une solidité fixée par Dieu lui-même. Malgré les « flots » symboles des forces chaotiques, Dieu règne.
Apocalypse 1
L’expression grecque archôn tôn basileôn tês gês (« chef des rois de la terre ») proclame que Jésus domine toute autorité humaine. Le titre « Alpha et Oméga » affirme la seigneurie absolue du Christ sur le temps et l’histoire.
Jean 18
« Mon royaume n’est pas d’ici » ne signifie pas que le royaume est immatériel, mais qu’il n’a pas pour source les systèmes politiques humains. Il vient d’en haut. Le verbe marturein (« rendre témoignage ») désigne la mission royale du Christ : manifester la vérité de Dieu.
Applications
Pour les chrétiens
Nous servons un Roi qui n’a pas besoin de violence pour régner : sa puissance est vérité, justice et fidélité. Cela nous appelle à une loyauté entière au Christ au-dessus de toute autre allégeance. Son Royaume gouverne nos décisions, notre éthique, notre espérance.
Pour les militaires
Votre mission s’exerce dans un cadre terrestre, légal, défini par l’État. Mais votre conscience appartient au Roi des rois. Vous exercez la force dans la vérité, la droiture, la retenue et le respect de la dignité humaine. Là où les flots grondent — conflits, crises, chaos — Dieu demeure plus puissant. Servir avec justice et intégrité est une manière de refléter le Roi qui ne règne ni par la peur ni par le mensonge, mais par la vérité.
Pour l’Église
L’Église ne conquiert pas par la force mais par le témoignage. Elle rend visible le Royaume qui vient : un royaume de lumière, de fidélité et de paix.
Synthèse
Toutes les lectures convergent : il n’y a qu’un seul Roi véritable, le Christ, qui règne par la justice, la vérité et la fidélité. Les royaumes humains passent ; son Royaume demeure. Nos vies doivent refléter cette royauté : droiture, vérité, courage, fidélité et espérance.
Thème du culte
Le règne du Christ : la vérité qui triomphe du chaos.
Exégèse détaillée de Jean 18
1. 18.1-3 – Le jardin, nouvelle scène d’Alliance
Jean 18 s’ouvre sur le passage du Cénacle au jardin.
Le terme « jardin » est κῆπος (kēpos). Jean ne dit pas « Gethsémané », mais κῆπος, faisant écho au jardin d’Éden et au jardin du Cantique des cantiques. Théologiquement, c’est le lieu où le « nouvel Adam » accomplit l’obéissance que le premier Adam a refusée.
« Jésus, après avoir dit cela, sortit » : ἐξῆλθεν (exēlthen), « il sortit ». Ce verbe rappelle : Jésus sort de la ville, sort du repas, vient à la rencontre de l’épreuve. Il ne se cache pas, il s’avance.
Judas est décrit comme « celui qui le livrait » : ὁ παραδιδοὺς αὐτόν (ho paradidous auton), participe présent du verbe παραδίδωμι (paradidōmi), « livrer, transmettre, trahir ». Jean joue sur le double sens : Judas « transmet » Jésus aux autorités, mais en réalité, Dieu « livre » son Fils pour le salut du monde (cf. Romains 8.32).
La troupe vient avec « lanternes, torches et armes » : φανῶν καὶ λαμπάδων καὶ ὅπλων. Ironie johannique : ceux qui viennent prendre la Lumière du monde (cf. Jean 8.12) s’éclairent avec des petites lumières humaines.
2. 18.4-9 – « C’est moi » : ἐγώ εἰμι
« Jésus, sachant tout ce qui allait lui arriver » : εἰδὼς πάντα τὰ ἐρχόμενα ἐπ’ αὐτόν. Le participe εἰδώς (eidōs) souligne sa connaissance totale. Il n’est pas victime surprise, mais Seigneur qui connaît et assume l’épreuve.
Il « sortit » (προῆλθεν, proēlthen) vers eux. Encore une fois, il prend l’initiative : il va vers ceux qui viennent le saisir.
À la question « Qui cherchez-vous ? », ils répondent : « Jésus le Nazarénien » (Ἰησοῦν τὸν Ναζωραῖον). Jésus répond : ἐγώ εἰμι (egō eimi). Nos traductions disent « C’est moi », mais en grec c’est la formule absolue « Je suis », qui rappelle le Nom divin révélé en Exode 3.14 (LXX : ἐγώ εἰμι ὁ ὤν, « Je suis celui qui est »). Leur réaction confirme la portée de cette parole : « Ils reculèrent et tombèrent par terre » (ἀπῆλθαν εἰς τὰ ὀπίσω καὶ ἔπεσαν χαμαί). Devant la révélation du « Je Suis », la puissance humaine s’effondre.
Le verset 9 souligne l’accomplissement de la parole de Jésus en Jean 17.12 : « De ceux que tu m’as donnés, je n’en ai perdu aucun ». Le verbe ἀπόλλυμι (apollymi, « perdre, faire périr ») met en lumière que Jésus se livre lui-même pour que les siens soient gardés. Il se place entre la troupe et ses disciples.
3. 18.10-11 – L’épée et la coupe
Pierre frappe l’esclave du grand prêtre. L’« épée » est μάχαιρα (machaira), arme courte, plus proche du poignard de combat. L’« esclave » (δοῦλος, doulos) du grand prêtre, nommé Malchus, souligne que la scène touche directement le centre de la structure religieuse.
Jésus commande à Pierre : « Remets ton épée dans le fourreau » : βάλε τὴν μάχαιραν εἰς τὴν θήκην. La mission de Jésus ne passe pas par la violence.
« Ne boirai-je pas la coupe que le Père m’a donnée ? » La « coupe » est ποτήριον (potērion). Dans l’Ancien Testament, la « coupe » est souvent l’image de la colère ou du jugement de Dieu (Psaume 75.9 ; Ésaïe 51.17). Jésus reçoit cette « coupe » de la main du Père et la boit à notre place. Jean insiste : c’est le Père qui « donne » (δέδωκεν, dedōken) cette coupe. La Passion est à la fois l’œuvre des hommes et l’œuvre du dessein divin.
4. 18.12-14, 19-24 – L’interrogatoire religieux : parole et lumière
Jésus est conduit tout d’abord chez Anne (Ἅννας, Hannas), puis il est question de Caïphe, le grand prêtre (ἀρχιερεύς, archiereus). Le titre souligne l’autorité religieuse maximale.
Au verset 19, le grand prêtre interroge Jésus « sur ses disciples et sur son enseignement » : περὶ τῶν μαθητῶν αὐτοῦ καὶ περὶ τῆς διδαχῆς αὐτοῦ. μαθητής (mathētēs) renvoie aux disciples ; διδαχή (didachē) à l’enseignement, la doctrine.
Réponse de Jésus (v. 20) : « Moi, j’ai parlé ouvertement au monde » : ἐγὼ παρρησίᾳ (parrēsia, franchise, liberté de parole) λελάληκα τῷ κόσμῳ (kosmos, le monde). La « parrêsia » désigne une parole publique, claire, sans cachotterie. Jésus n’est pas chef d’une secte secrète : son message est proclamé au grand jour.
« J’ai toujours enseigné (ἐδίδαξα, edidaxa) dans la synagogue (συναγωγή, synagōgē) et dans le temple (ἱερόν, hieron), où tous les Juifs se rassemblent, et je n’ai rien dit en secret ». Jean oppose la transparence de Jésus à la duplicité de ceux qui le jugent de nuit.
Lorsqu’un garde le frappe, Jésus répond : « Si j’ai mal parlé (κακῶς ἐλάλησα), témoigne du mal ; sinon, pourquoi me frappes-tu ? ». Le verbe μαρτυρέω (martyreō, « témoigner ») renvoie à l’idée de témoignage légal. Jésus réclame un jugement juste fondé sur des faits, non sur la violence.
5. 18.15-18, 25-27 – Pierre, le disciple qui suit et renie
Pierre « suivait » Jésus : ἠκολούθει (ēkolouthei), imparfait de ἀκολουθέω (akoloutheō), « suivre, accompagner comme disciple ». Il y a ici une ironie tragique : le disciple qui « suit » extérieurement va renier intérieurement.
Le décor est celui de la « cour » (αὐλή, aulē) du grand prêtre, avec des serviteurs et des gardes qui ont fait un feu de braise : ἀνθρακία (anthrakia, feu de charbon), terme rare chez Jean (il reviendra en Jean 21.9 quand Jésus rétablit Pierre). Même lieu symbolique (feu de braise), deux scènes opposées : reniement puis restauration.
La question : « N’es-tu pas toi aussi des disciples de cet homme ? » utilise le pronom καί σύ (kai sy, « toi aussi »). La nuance : Pierre est associé aux autres disciples, mais se dissocie lui-même : « Je ne suis pas » (οὐκ εἰμί, ouk eimi). Contraste violent avec les ἐγώ εἰμι de Jésus : Jésus affirme « Je suis », Pierre dit « Je ne suis pas ».
Le chant du coq (ἀλέκτωρ, alektōr) marque la limite de la force humaine et l’accomplissement de la parole de Jésus (18.27). Ici encore, la prophétie de Jésus se réalise jusque dans le détail.
6. 18.28-32 – Pureté rituelle et impureté réelle
Les autorités mènent Jésus au prétoire (πραιτώριον, praitōrion), résidence du gouverneur romain. Ils n’entrent pas « pour ne pas se souiller » : ἵνα μὴ μιανθῶσιν (mianthōsin, verbe μιάινω, miainō, « souiller, rendre impur »), « mais qu’ils puissent manger la Pâque » (φαγῶσιν τὸ πάσχα, phagōsin to pascha).
Ironie aiguë : ils ont scrupule pour une impureté rituelle, mais ils complotent la mise à mort du Fils de Dieu. Ils veulent rester « purs » pour manger l’agneau pascal, tout en livrant l’Agneau de Dieu (cf. Jean 1.29).
Le verset 32 souligne encore l’accomplissement : « afin que s’accomplît (πληρωθῇ, plērōthē) la parole que Jésus avait dite, indiquant de quelle mort il devait mourir ». Jean pense surtout à Jean 12.32 (« quand j’aurai été élevé de la terre »). Le verbe ὑψόω (hypsōō, « élever ») signifie à la fois « crucifier » et « glorifier ». La crucifixion est le trône paradoxal du Roi.
7. 18.33-38a – Le Royaume et la vérité
C’est le cœur théologique du chapitre.
Pilate demande : « Es-tu le roi des Juifs ? » (σὺ εἶ ὁ βασιλεὺς τῶν Ἰουδαίων; su ei ho basileus tōn Ioudaiōn). Le terme βασιλεύς (basileus, roi) ici est chargé politiquement (un prétendant royal est un rival de César), mais pour Jean, il prend un sens plus profond : Jésus est le Roi messianique, et plus encore, le Roi du monde.
Jésus répond en demandant : « Dis-tu cela de toi-même, ou d’autres te l’ont-ils dit de moi ? » Il déplace la question politique vers une question de vérité personnelle.
La phrase clé (v. 36) :
Ἡ βασιλεία ἡ ἐμὴ οὐκ ἔστιν ἐκ τοῦ κόσμου τούτου.
« Mon royaume n’est pas de ce monde. »
Deux mots sont centraux :
– βασιλεία (basileia) : royaume, règne, souveraineté. Ce n’est pas seulement un territoire, mais une autorité active.
– ἐκ (ek) : « provenant de, issu de ». Jésus ne dit pas seulement « mon royaume n’est pas dans ce monde », mais « il n’est pas issu de ce monde ». Son origine, sa source, n’est pas dans les structures politiques humaines, même s’il se manifeste dans le monde.
Preuve donnée par Jésus : « Si mon royaume était de ce monde, mes serviteurs auraient combattu » (ἠγωνίζοντο, ēgōnizonto, verbe ἀγωνίζομαι, lutter, combattre). Le Royaume du Christ ne se défend pas par les mêmes armes que les royaumes humains.
Pilate reprend : « Donc, tu es roi ? » (οὐκοῦν βασιλεὺς εἶ σύ;). Jésus répond :
« Tu le dis, je suis roi » (σὺ λέγεις ὅτι βασιλεύς εἰμι).
Puis il interprète sa royauté :
« Je suis né et je suis venu dans le monde pour rendre témoignage à la vérité » :
εἰς τοῦτο γεγέννημαι καὶ εἰς τοῦτο ἐλήλυθα εἰς τὸν κόσμον, ἵνα μαρτυρήσω τῇ ἀληθείᾳ.
Mots clés :
– μαρτυρέω (martyreō) : « rendre témoignage », terme juridique. Jésus est le témoin suprême de la réalité de Dieu.
– ἀλήθεια (alētheia) : « vérité », non pas seulement exactitude intellectuelle, mais réalité fidèle de Dieu, lumière qui révèle les choses comme elles sont devant lui. Chez Jean, Jésus est lui-même « la vérité » (Jean 14.6).
« Quiconque est de la vérité écoute ma voix » : πᾶς ὁ ὢν ἐκ τῆς ἀληθείας ἀκούει μου τῆς φωνῆς.
– ἐκ τῆς ἀληθείας : « issu de la vérité », « appartenant à la sphère de la vérité ». Il s’agit d’appartenance intérieure : ceux qui sont « de Dieu », qui sont « nés d’en haut », sont attirés par la voix du Christ.
– ἀκούω (akouō, « écouter, entendre ») ici implique obéissance et foi : écouter pour suivre.
La fameuse question de Pilate : « Qu’est-ce que la vérité ? » (τί ἐστιν ἀλήθεια; ti estin alētheia ?). Il ne reste pas pour écouter la réponse. L’ironie johannique : la Vérité (Jésus) est devant lui, et il pose la question sans attendre la réponse.
8. 18.38b-40 – Barabbas, le faux libérateur
Pilate déclare : « Je ne trouve aucun crime en lui » : οὐδεμίαν εὑρίσκω ἐν αὐτῷ αἰτίαν (aidian, motif d’accusation). Jésus apparaît innocent devant le tribunal romain.
La foule réclame la libération de Barabbas (Βαραββᾶς, Barabbas) plutôt que celle de Jésus. Jean précise : « Or Barabbas était un brigand » : ἦν δὲ ὁ Βαραββᾶς λῃστής (lēstēs). Le mot λῃστής n’est pas seulement « voleur » : il désigne souvent un bandit armé, un insurgé, un guerrillero. C’est un homme de violence politique.
Ironie théologique :
– Barabbas = « fils du père » (bar-abbā en araméen), un faux « fils du père », libéré à la place du vrai Fils du Père.
– Le peuple choisit un libérateur violent à la place de celui qui apporte un royaume de vérité et de paix.
– Substitution : le coupable est relâché, l’innocent est condamné. C’est déjà une image du sens de la croix : Christ prend la place du pécheur.
Applications théologiques majeures de Jean 18 (avec les mots grecs)
- La souveraineté de Jésus dans la Passion
– εἰδώς πάντα (eidōs panta) : il sait tout.
– ἐγώ εἰμι (egō eimi) : il se manifeste comme le « Je suis ».
– προῆλθεν (proēlthen) : il vient au-devant de ses ennemis.
La Passion n’est pas une défaite subie, mais l’obéissance souveraine du Fils. - Un Royaume d’une autre origine
– ἡ βασιλεία ἡ ἐμή οὐκ ἔστιν ἐκ τοῦ κόσμου τούτου (hē basileia hē emē ouk estin ek tou kosmou toutou).
Le Royaume du Christ ne vient pas des logiques de pouvoir, de force, de manipulation. Mais il se déploie dans le monde par le témoignage, la vérité, la croix. - La vérité comme réalité qui appelle l’écoute
– μαρτυρήσω τῇ ἀληθείᾳ (martyresō tē alētheia).
– πᾶς ὁ ὢν ἐκ τῆς ἀληθείας ἀκούει (pas ho ōn ek tēs alētheias akouei).
La vérité n’est pas seulement une idée, mais une appartenance : être « de la vérité », c’est être attiré par la voix du Christ, écouter et suivre. - Pierre : faiblesse du disciple et fidélité de Jésus
– ἀκολουθέω (akoloutheō) / οὐκ εἰμί (ouk eimi).
Le disciple suit, mais renie. Jésus, lui, demeure le « Je suis ». La grâce souveraine le restaurera (Jean 21), montrant que la solidité de la foi ne repose pas sur notre force, mais sur la fidélité du Seigneur. - Barabbas : choix tragique du monde
– λῃστής (lēstēs).
Le monde préfère le faux libérateur violent au vrai Roi crucifié. Pourtant, c’est en prenant la place du coupable que Jésus devient notre Sauveur.
Plan de prédication complet
Titre proposé
Le Royaume qui ne vient pas de ce monde
INTRODUCTION
Jean 18 présente Jésus au moment où l’ombre de la croix s’étend sur lui. Pourtant, au lieu de subir, il règne. Tout y révèle sa souveraineté, son identité divine et la nature unique de son Royaume. Alors que les autorités religieuses et politiques sont en pleine agitation, le Christ se tient droit, libre, maître de toute la scène. Ce passage dit à l’Église, et en particulier à ceux qui portent une responsabilité d’autorité — comme les militaires — ce que signifie appartenir à un Royaume qui n’est pas issu des mécanismes humains.
I. LE ROI QUI S’AVANCE (JEAN 18.1–11)
A. Jésus prend l’initiative
Le verbe προῆλθεν (« il s’avança ») montre que Jésus ne subit pas l’arrestation. Il vient à la rencontre de ceux qui viennent le livrer. Un roi qui ne se cache pas. Un Roi qui marche au-devant du combat.
B. La révélation du Nom : ἐγώ εἰμι
Quand Jésus dit « Je suis » (ἐγώ εἰμι), les soldats tombent par terre. Devant le « Je suis », la puissance humaine s’écroule. C’est le Dieu de l’Alliance qui se tient devant eux.
C. La coupe acceptée
Jésus refuse la violence impulsive de Pierre. Il reçoit la « coupe » (ποτήριον) de son Père. La mission du Christ passe par l’obéissance, non par l’épée.
Applications
Pour tous : faire face aux épreuves non comme victimes mais comme disciples qui s’avancent en confiance, sachant que Christ les précède.
Pour les militaires : la vraie force n’est pas la réaction impulsive mais la maîtrise. Le service dans la force doit être soumis à la justice et à la mission, non à la colère ou à l’orgueil.
II. LE ROI QUI PARLE EN VÉRITÉ (JEAN 18.12–27)
A. Parole ouverte : παρρησία
Jésus dit avoir parlé « ouvertement » (παρρησίᾳ). Rien de secret. La vérité n’a pas besoin de cacher quoi que ce soit. Son enseignement est transparent, accessible, public.
B. La lumière face à la violence
Jésus demande : « Si j’ai mal parlé, témoigne du mal ». Le verbe μαρτυρέω (« témoigner ») révèle que Jésus appelle à une procédure juste, contrairement à la violence du garde.
C. Pierre : le disciple qui dit « Je ne suis pas »
Le contraste est saisissant : Jésus dit « Je suis » ; Pierre dit « Je ne suis pas » (οὐκ εἰμί). L’un reste fidèle, l’autre vacille. L’Évangile ne cache pas la faiblesse des disciples : le salut repose sur la fidélité du Christ, non sur la nôtre.
Applications
Pour tous : la vérité chrétienne est une vérité qui se vit et se dit au grand jour ; elle rejette les compromis.
Pour les militaires : fidélité, intégrité, respect de la vérité dans les rapports, dans la chaîne hiérarchique, dans les décisions. Le mensonge, même utile tactiquement, est destructeur moralement.
III. LE ROI QUI N’EST PAS ISSU DE CE MONDE (JEAN 18.28–40)
A. Le contraste ironique de la « pureté » religieuse
Les accusateurs ne veulent pas entrer au prétoire pour « ne pas se souiller », mais ils complotent la mort du Saint de Dieu. Souci du rituel, indifférence à la justice. Jésus révèle la vraie nature de la pureté : elle est dans la droiture du cœur.
B. « Mon royaume n’est pas de ce monde »
Central : ἡ βασιλεία ἡ ἐμή οὐκ ἔστιν ἐκ τοῦ κόσμου τούτου.
Il ne dit pas que son royaume n’a rien à voir avec le monde, mais qu’il n’en provient pas. Son autorité ne dépend ni des foules, ni de la politique, ni de la force. Son règne vient d’en haut.
C. Le Roi de la vérité
« Pour ceci je suis né… Afin de rendre témoignage à la vérité. »
Ce Roi conquiert non par les armes, mais par la lumière. Être « de la vérité » signifie écouter sa voix, c’est-à-dire lui obéir.
D. Barabbas : le faux libérateur
λῃστής : brigand armé, insurgé. Le monde préfère un sauveur violent au Roi crucifié. Mais Jésus prend la place du coupable. Le Royaume avance par le sacrifice, pas par la domination.
Applications
Pour tous : vivre sous l’autorité du Christ, c’est choisir sa vérité contre les mensonges du monde, sa lumière contre l’obscurité morale, son Royaume contre nos ambitions.
Pour les militaires : l’autorité ultime n’est pas celle des puissances terrestres, mais celle du Roi des rois. Votre service est honorable, mais ne doit jamais supplanter votre fidélité au Christ. Vous exercez une force réglementée, juste et cadrée, mais votre conscience, elle, est régie par la vérité du Christ.
CONCLUSION
Jean 18 nous révèle un Roi souverain, humble, vrai, qui s’avance au-devant du combat, parle ouvertement, refuse la violence charnelle, et instaure un Royaume dont la source est Dieu lui-même. À sa suite, nous sommes appelés à vivre dans la vérité, dans la fidélité et dans la justice, que nous soyons civils ou militaires.
THÈME DU CULTE
Le Royaume du Christ, vérité qui désarme les puissances.
Citations des Pères de l’Eglise et des Réformateurs sur la royauté du Christ
PÈRES DE L’ÉGLISE
Irénée de Lyon (env. 130–202)
Sur la royauté du Christ
« Le Christ a récapitulé en lui toutes choses afin d’être le Seigneur des vivants et des morts. »
(Contre les Hérésies, III.19.2)
Sens : le règne du Christ embrasse toute l’histoire et toute la création ; il est Roi car tout est repris en lui.
Origène (env. 185–254)
Sur Jean 18.36
« Son royaume n’est pas de ce monde parce qu’il ne vient ni de la violence ni de l’injustice, mais de la vérité et de la justice divines. »
(Commentaire sur Jean, XXVIII.9)
Sens : la royauté du Christ n’imite pas les royaumes humains, elle procède d’une autre source — Dieu lui-même.
Jean Chrysostome (env. 349–407)
Sur l’autorité du Christ devant Pilate
« Il se tient devant Pilate comme un juge devant un accusé. Il ne nie pas sa royauté, mais Il montre qu’elle est d’un autre ordre. »
(Homélies sur Jean, 83.2)
Sens : même dans l’humiliation, Jésus manifeste sa souveraineté.
Augustin d’Hippone (354–430)
Sur le Royaume non issu du monde
« Le Seigneur n’a pas dit : mon royaume n’est pas dans ce monde, mais : il n’est pas de ce monde… Il fait des rois de la terre ceux qui ne cherchent pas à dominer, mais à servir avec justice. »
(Tractatus in Ioannem, 115.2)
Sens : distinction entre origine du Royaume (céleste) et présence dans le monde (réelle). La royauté du Christ transforme la manière d’exercer l’autorité.
Cyrille d’Alexandrie (378–444)
Sur la vérité du Christ
« Il règne par la vérité, car il est lui-même la vérité du Père. Ceux qui aiment la vérité se soumettent naturellement à son sceptre. »
(Commentaire sur Jean, Livre 12)
Sens : le règne du Christ s’étend par la vérité qui attire les cœurs.
RÉFORMATEURS
Martin Luther (1483–1546)
Sur « Mon royaume n’est pas de ce monde »
« Le royaume du Christ est spirituel : il gouverne les consciences par la Parole et non par l’épée. »
(Commentaire de Jean 18.36)
Sens : Christ règne sur les cœurs par la vérité, non par la coercition.
Jean Calvin (1509–1564)
Sur la royauté du Christ devant Pilate
« Le royaume du Christ ne renverse pas les gouvernements, mais il soumet toutes les puissances sous sa vérité. »
(Commentaire sur Jean 18.36)
Sens : la royauté du Christ n’abolit pas les autorités civiles, mais les relativise par sa souveraineté supérieure.
Sur la dignité royale du Christ
« Le Christ, en confessant sa royauté devant Pilate, nous apprend que sa croix est son sceptre et son trône. »
(Institutions, II.15.3)
Pierre Martyr Vermigli (1499–1562)
Sur l’opposition entre Barabbas et le Christ
« Les hommes choisissent un libérateur selon la chair ; Dieu nous donne un Roi selon l’Esprit. »
(Commentaire sur Jean, ad loc.)
Sens : le monde préfère la violence, mais Dieu donne le Roi crucifié.
Heinrich Bullinger (1504–1575)
Sur le Royaume du Christ
« Le règne du Christ est éternel, invisible selon le monde, mais puissant pour sauver. Aucun royaume humain ne peut lui être comparé. »
(Deuxième Helvétique, ch. XI)
Sens : affirmation de la supériorité du règne du Christ sur toute autorité terrestre.
Synthèse
Irénée montre la souveraineté cosmique du Christ,
Origène et Chrysostome insistent sur sa royauté non violente,
Augustin fait la distinction fondamentale entre un royaume présent dans mais non issu du monde,
Cyrille explique que Christ règne par la vérité,
Luther et Calvin confirment que son Royaume est spirituel et fondé sur la Parole,
Vermigli souligne le choix tragique de Barabbas,
Bullinger rappelle que le Royaume du Christ est éternel et incomparable.
Liturgie réformée complète
Accueuil et salutation
Que la grâce et la paix vous soient données de la part de Jésus-Christ, le Témoin fidèle, le Premier-né d’entre les morts et le Prince des rois de la terre. Il est notre Roi, et nous venons pour écouter sa voix et marcher dans sa vérité.
Appel à l’adoration
Frères et sœurs, approchons-nous du Dieu vivant. Jésus s’est avancé vers ceux qui venaient le prendre ; il s’avance aujourd’hui vers nous par sa Parole. Que tout ce qui respire loue le Seigneur, car son Royaume n’est pas issu de ce monde, mais il règne sur toute chose.
Psaume ou cantique d’ouverture
Psaume 93 ou un cantique proclamant la souveraineté du Christ.
Prière d’ouverture (Invocation)
Éternel notre Dieu,
Tu es le Roi des rois et le Seigneur des seigneurs.
Nous venons devant toi pour reconnaître ta majesté,
accueillir ta vérité et écouter ta voix.
Ouvre nos cœurs, éclaire nos esprits,
donne-nous un esprit de paix, d’humilité et d’obéissance.
Par Jésus-Christ, notre Roi et notre Sauveur. Amen.
Lecture de la Loi de Dieu (ou rappel de la volonté de Dieu)
Voici ce que le Seigneur attend de nous :
aimer Dieu de tout notre cœur, de toute notre âme, de toute notre pensée et de toute notre force ;
et aimer notre prochain comme nous-mêmes.
Sur ces deux commandements repose toute la Loi et les Prophètes.
Prière de confession des péchés
Seigneur notre Dieu,
Nous confessons que souvent nous avons cherché des royaumes humains plutôt que ton règne.
Nous avons préféré nos forces à ton obéissance, nos pensées à ta vérité.
Comme Pierre, nous t’avons parfois renié par nos paroles, nos gestes ou nos silences.
Pardonne-nous, purifie-nous, relève-nous.
Restaure en nous un cœur qui écoute ta voix.
Au nom de Jésus, qui a bu la coupe que le Père lui a donnée. Amen.
Annonce du pardon
Écoutez la Bonne Nouvelle :
Le Christ est venu dans le monde pour rendre témoignage à la vérité,
et la vérité est que Dieu fait grâce à ceux qui se repentent.
En Jésus-Christ, vous êtes pardonnés, réconciliés, renouvelés.
Que son Royaume règne dans vos cœurs.
Prière d’illumination avant les lectures
Seigneur,
Toi qui fais tomber les puissances humaines devant le « Je suis » de ton Fils,
ouvre maintenant nos oreilles et nos cœurs.
Par ton Esprit, fais-nous entendre ta voix,
et accorde-nous d’être « de la vérité »,
pour que nous suivions ton Christ avec fidélité.
Amen.
Lectures bibliques
2 Samuel 23.1–7
Psaume 93
Apocalypse 1.4–8
Jean 18
Prédication
Thème : Le Royaume du Christ, vérité qui désarme les puissances.
Confession de foi
Je crois en Dieu, le Père tout-puissant, créateur du ciel et de la terre.
Je crois en Jésus-Christ, son Fils unique, notre Seigneur…
(ou une confession de foi réformée adaptée, selon votre usage local)
Prière d’intercession
Dieu souverain,
Nous prions pour ton Église dans le monde,
afin qu’elle rende témoignage à la vérité sans crainte et sans compromis.
Nous prions pour les autorités de notre pays,
pour qu’elles exercent la justice et recherchent la paix.
Nous prions pour les militaires, engagés pour la sécurité et la protection du prochain :
qu’ils exercent la force avec discernement, loyauté et respect de la dignité humaine.
Nous prions pour les souffrants, les endeuillés, les éprouvés,
pour ceux qui se sentent rejetés ou sans espérance.
Étends ton règne, Seigneur,
et que ta vérité éclaire nos vies.
Par Jésus-Christ. Amen.
Notre Père
Notre Père qui es aux cieux…
Offrande
L’offrande est un acte de reconnaissance envers le Roi qui s’est donné pour nous.
Envoi
Frères et sœurs,
Allez dans le monde comme témoins du Royaume qui n’est pas issu de ce monde.
Vivez dans la vérité, marchez dans la lumière, servez dans la justice.
Bénédiction
Que la paix du Christ,
le Roi qui s’avance,
le Roi qui parle en vérité,
le Roi dont le Royaume vient du Père,
soit avec vous maintenant et toujours.
Amen.

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