En ce deuxième dimanche de l’Avent, l’Église est invitée à se tenir dans l’attente active du Roi qui vient. Les lectures de ce jour nous placent sous la voix de Jean-Baptiste, qui appelle Israël à un renouvellement profond : « Préparez le chemin du Seigneur ». À la lumière d’Ésaïe 11, nous découvrons le Roi messianique, humble rejeton d’Isaï, rempli de l’Esprit et porteur d’une paix qui renouvelle la création. Avec l’apôtre Paul, dans Romains 15, nous contemplons l’accomplissement des promesses de Dieu en Christ, qui unit Juifs et nations dans une même espérance. Enfin, l’Évangile selon Matthieu nous rappelle l’urgence de la repentance et la venue du Messie qui baptise du Saint-Esprit et de feu.
Cette page rassemble l’ensemble des éléments destinés à nourrir la prière, l’étude et la célébration de ce culte : lectures bibliques du jour en version Segond, exégèse détaillée des textes, prédication complète, liturgie réformée intégrant les thèmes de l’Avent, ainsi que des propositions de psaumes et de cantiques.
Vous y trouverez tout le nécessaire pour vivre ce dimanche dans la lumière de l’attente chrétienne : une attente empreinte de vérité, de conversion et surtout de l’espérance que Dieu renouvelle son alliance et rassemble son peuple autour de son Fils.
En bref
Ésaïe 11.1-10 – Un Roi idéal et un monde restauré
Ce passage annonce la venue d’un descendant d’Isaï, un Roi messianique rempli de l’Esprit de l’Éternel. Il exercera un règne parfaitement juste, protecteur des faibles, redresseur du mal, et porteur d’une paix si profonde qu’elle touchera même la création animale. Ce règne deviendra un signal pour les nations qui chercheront la présence de Dieu.
Psaume 72.1-2, 7-8, 12-13, 17 – Le règne du Messie comme modèle de justice et de paix
Ce psaume décrit le roi idéal selon Dieu : un souverain qui gouverne avec justice, défend le pauvre, secourt le malheureux, et apporte une paix durable à tout son royaume. Sa domination s’étend aux nations, et son nom demeure source de bénédiction dans le monde entier.
Romains 15.4-9 – L’espérance offerte à tous, Juifs et nations
Paul rappelle que les Écritures nourrissent l’espérance. L’unité entre croyants, recherchée par Dieu, découle de l’action du Christ qui a confirmé les promesses faites à Israël tout en ouvrant la miséricorde de Dieu aux nations. Le Messie attendu n’est pas seulement pour un peuple, mais pour tous.
Matthieu 3.1-12 – La préparation intérieure au règne de Dieu
Jean-Baptiste apparaît comme le héraut qui appelle à la repentance, car le Royaume approche. Il annonce un Messie puissant qui vient purifier, discerner, et établir la vérité. L’entrée dans ce royaume exige un cœur transformé, visible par des fruits dignes de la repentance.
Synthèse – Le thème commun : L’avènement d’un Roi juste qui apporte paix et espérance, et appelle son peuple à la conversion
Les quatre textes convergent vers une même vision : Dieu fait venir son Roi, le Messie. Ésaïe décrit ce Roi idéal et son règne de justice ; le psaume en chante l’autorité et la compassion ; Paul en montre l’accomplissement dans le Christ qui unit les peuples ; Jean-Baptiste, enfin, prépare les cœurs à recevoir ce règne par la repentance. Le message central du 2ᵉ dimanche de l’Avent est donc double :
L’espérance : Dieu fait venir un Roi juste, qui restaure, sauve et rassemble.
La préparation : Pour accueillir ce Roi, il faut se laisser purifier, se repentir et produire du fruit.
Textes (version Louis Segond 1910)
Ésaïe 11.1-10
1 Un rameau sortira du tronc d’Isaï, et un rejeton naîtra de ses racines.
2 L’Esprit de l’Éternel reposera sur lui : esprit de sagesse et d’intelligence, esprit de conseil et de force, esprit de connaissance et de crainte de l’Éternel.
3 Il respirera la crainte de l’Éternel ; il ne jugera point sur l’apparence, il ne prononcera point sur un ouï-dire.
4 Mais il jugera les pauvres avec équité, et il prononcera avec droiture sur les malheureux de la terre ; il frappera la terre de la verge de sa bouche, et du souffle de ses lèvres il fera mourir le méchant.
5 La justice sera la ceinture de ses flancs, et la fidélité la ceinture de ses reins.
6 Le loup habitera avec l’agneau, et la panthère se couchera avec le chevreau ; le veau, le lionceau, et le bétail qu’on engraisse, seront ensemble, et un petit enfant les conduira.
7 La vache et l’ourse auront un même pâturage, leurs petits un même gîte ; et le lion mangera de la paille comme le bœuf.
8 Le nourrisson s’ébattra sur l’antre de la vipère, et l’enfant sevré mettra sa main dans la caverne du basilic.
9 On ne fera point de mal et point de dommage sur toute ma montagne sainte ; car la terre sera pleine de la connaissance de l’Éternel, comme le fond de la mer par les eaux qui le couvrent.
10 En ce jour, le rejeton d’Isaï sera là comme une bannière pour les peuples ; les nations se tourneront vers lui, et sa demeure sera glorieuse.
Psaume 72.1-2, 7-8, 12-13, 17
1 Ô Dieu, donne tes jugements au roi, et ta justice au fils du roi.
2 Il jugera ton peuple avec justice, et tes malheureux avec équité.
7 En ses jours le juste fleurira, et la paix sera grande jusqu’à ce qu’il n’y ait plus de lune.
8 Il dominera d’une mer à l’autre, et du fleuve aux extrémités de la terre.
12 Car il délivrera le pauvre qui crie, et le malheureux qui n’a point d’aide.
13 Il aura pitié du misérable et de l’indigent, et il sauvera la vie des pauvres.
17 Son nom subsistera toujours ; aussi longtemps que le soleil, son nom se perpétuera. Par lui on se bénira mutuellement, et toutes les nations le diront heureux.
Romains 15.4-9
4 Or, tout ce qui a été écrit d’avance l’a été pour notre instruction, afin que, par la patience et par la consolation que donnent les Écritures, nous possédions l’espérance.
5 Que le Dieu de la patience et de la consolation vous donne d’avoir les mêmes sentiments les uns envers les autres selon Jésus-Christ,
6 afin que tous ensemble, d’une même bouche, vous glorifiiez le Dieu et Père de notre Seigneur Jésus-Christ.
7 Accueillez-vous donc les uns les autres, comme Christ vous a accueillis, pour la gloire de Dieu.
8 Je dis, en effet, que Christ a été serviteur des circoncis, pour prouver la véracité de Dieu en confirmant les promesses faites aux pères,
9 tandis que les païens glorifient Dieu à cause de sa miséricorde, selon qu’il est écrit : C’est pourquoi je te célébrerai parmi les nations, et je chanterai à la gloire de ton nom.
Matthieu 3.1-12
1 En ces jours-là parut Jean-Baptiste, prêchant dans le désert de Judée.
2 Il disait : Repentez-vous, car le royaume des cieux est proche.
3 Jean est celui qui avait été annoncé par Ésaïe, le prophète, quand il dit : C’est ici la voix de celui qui crie dans le désert : Préparez le chemin du Seigneur, aplanissez ses sentiers.
4 Jean avait un vêtement de poil de chameau, et une ceinture de cuir autour des reins. Il se nourrissait de sauterelles et de miel sauvage.
5 Les habitants de Jérusalem, de toute la Judée et de tout le pays des environs du Jourdain, se rendaient auprès de lui ;
6 et, confessant leurs péchés, ils se faisaient baptiser par lui dans le fleuve du Jourdain.
7 Mais, voyant venir à son baptême beaucoup de pharisiens et de sadducéens, il leur dit : Race de vipères, qui vous a appris à fuir la colère à venir ?
8 Produisez donc du fruit digne de la repentance,
9 et ne prétendez pas dire en vous-mêmes : Nous avons Abraham pour père ! Car je vous déclare que de ces pierres Dieu peut susciter des enfants à Abraham.
10 Déjà la cognée est mise à la racine des arbres : tout arbre qui ne porte pas de bons fruits sera coupé et jeté au feu.
11 Moi, je vous baptise d’eau, pour vous amener à la repentance ; mais celui qui vient après moi est plus puissant que moi, et je ne suis pas digne de porter ses souliers. Lui, il vous baptisera du Saint-Esprit et de feu.
12 Il a son van à la main ; il nettoiera son aire, et il amassera son blé dans le grenier, mais il brûlera la paille dans un feu qui ne s’éteint point.
Exégèse
Ésaïe 11.1-10 – Le rejeton d’Isaï et le royaume de shalom
- Contexte et structure
Nous sommes dans la section d’Ésaïe qui annonce, au cœur du jugement, un reste et une restauration (Ésaïe 7–12).
Au chapitre 10, Dieu abat l’Assyrien, comparé à une forêt orgueilleuse. Israël lui-même est comme un tronc abattu à cause du jugement. Dans ce contexte, Ésaïe 11 commence par une image de vie inattendue :
« Un rameau sortira du tronc d’Isaï, et un rejeton naîtra de ses racines » (v.1).
Le passage se déploie en trois mouvements :
v.1-3 : identité et qualifications spirituelles du Roi.
v.4-5 : son exercice de la justice.
v.6-9 : effets cosmique et pacificateur de son règne.
v.10 : portée universelle du Roi, « bannière pour les peuples ».
- Quelques mots hébreux-clés
« Rameau » : חֹטֶר (ḥôṭer) – petite pousse, jeune branche qui sort d’un tronc apparemment mort.
« Rejeton » : נֵצֶר (nēṣer) – jeune pousse, rejet. Ce mot donne un écho typologique au titre « Nazaréen » (Mt 2.23) dans la tradition chrétienne, même si l’étymologie exacte est discutée.
« Esprit » : רוּחַ (rûaḥ) – souffle, vent, esprit. Ici, c’est clairement l’Esprit de l’Éternel, qui confère au Roi sagesse, force, connaissance, crainte de Dieu.
« Crainte de l’Éternel » : יִרְאַת יְהוָה (yir’at YHWH) – respect révérencieux, qui conduit à l’obéissance et à la droiture, non une peur servile. - Exégèse rapide
v.1 : Le « tronc d’Isaï » met l’accent sur l’humanité humble du Messie. On ne dit pas « de David », mais « d’Isaï » : retour aux origines modestes de la dynastie.
v.2-3 : Sept expressions de l’Esprit (sagesse, intelligence, conseil, force, connaissance, crainte) que la tradition a souvent reliées aux « sept esprits » d’Apocalypse 1.4. Le Roi est entièrement qualifié par l’Esprit, ce que le NT voit accompli en Jésus (baptême, Lc 3–4).
v.3-5 : Il ne juge pas selon les apparences (contrairement aux juges humains). Il protège les pauvres, juge les oppresseurs, et son arme principale est « la verge de sa bouche » et « le souffle de ses lèvres » : la Parole.
v.6-9 : Tableau de paix paradisiaque : loup/agneau, lion/veau, enfant/vipère. C’est l’image d’une création réconciliée, où la violence est abolie. « La terre sera pleine de la connaissance de l’Éternel » : langage d’alliance renouvelée, universelle (cf. Jérémie 31.34).
v.10 : Le rejeton devient « bannière pour les peuples » : les nations se rassemblent vers lui. C’est déjà une ouverture claire aux païens. - Pères de l’Église et Réformateurs
Les Pères lisent ce texte comme une prophétie directe du Christ.
Irénée voit en Jésus le rejeton d’Isaï qui récapitule l’humanité dans l’obéissance, par opposition au premier Adam.
Augustin, dans La Cité de Dieu, revient souvent à ce passage pour décrire le royaume du Christ, supérieur aux royaumes terrestres.
Jean Chrysostome insiste sur la justice du Roi qui prend parti pour les pauvres.
Calvin, dans son commentaire sur Ésaïe, souligne que ce « petit rameau » semble insignifiant aux yeux du monde, mais qu’en lui réside toute la puissance de Dieu pour restaurer l’alliance davidique et rassembler les nations. Il insiste aussi sur le fait que les images animales sont surtout symboliques du changement radical des relations humaines sous le règne du Christ.
- Lien avec la théologie de l’alliance
Ésaïe 11 met en scène :
la fidélité de Dieu à l’alliance davidique (2 Samuel 7) malgré le jugement et l’exil ;
l’ouverture aux nations : ce Roi d’Israël devient bannière pour tous les peuples ;
la restauration de la création : écho à la bénédiction originelle (Genèse 1–2) et à la promesse à Abraham que toutes les familles de la terre seront bénies en lui (Genèse 12.3).
Nous avons ici un prolongement de l’alliance de grâce : malgré la faillite d’Israël, Dieu fait surgir un Roi issu de la même racine, qui portera l’alliance à son accomplissement universel.
Romains 15.4-9 – Un seul peuple, une seule espérance
- Contexte
Romains 14–15 traite des tensions entre « faibles » et « forts » (questions alimentaires, jours de fête, etc.). Paul ne parle pas seulement de psychologie individuelle, mais de tensions judéo-païennes dans l’Église. Les versets 4-9 articulent :
la fonction des Écritures (v.4),
la prière pour l’unité (v.5-6),
l’accueil mutuel en Christ (v.7),
et la place respectives des Juifs et des païens dans le plan de Dieu (v.8-9). - Mots grecs importants
« Patience » : ὑπομονή (hypomonē) – endurance, persévérance sous l’épreuve.
« Consolation » : παράκλησις (paraklēsis) – encouragement, exhortation, réconfort.
« Espérance » : ἐλπίς (elpis) – attente confiante fondée sur les promesses de Dieu.
« Les mêmes sentiments » : τὸ αὐτὸ φρονεῖν (to auto phronein) – avoir une même disposition, une même orientation de pensée.
« D’une même bouche » : ἐν ἑνὶ στόματι – louange communautaire unifiée, signe d’une réelle réconciliation.
« Serviteur des circoncis » : διάκονον περιτομῆς (diakonon peritomēs) – Christ s’est fait diacre/serviteur des Juifs, pour confirmer les promesses.
« Les païens » : τὰ ἔθνη (ta ethnē) – les nations, les non-Juifs, inclus dans la miséricorde. - Exégèse rapide
v.4 : Les Écritures de l’Ancien Testament ont été écrites « pour notre instruction », afin que nous possédions l’espérance. La fonction de l’Ancien Testament est donc clairement chrétienne et ecclésiale.
v.5-6 : Paul prie que Dieu donne l’unité pour que l’Église glorifie Dieu « d’une seule bouche ». L’unité n’est pas un but en soi, mais ordonnée à la gloire de Dieu.
v.7 : « Accueillez-vous donc les uns les autres, comme Christ vous a accueillis » : l’accueil mutuel est enraciné dans l’accueil que Christ nous a accordé dans l’alliance de grâce.
v.8-9 : Christ est serviteur des circoncis (fidélité à l’alliance abrahamique et davidique) et, en même temps, les païens glorifient Dieu pour sa miséricorde : même alliance de grâce, désormais étendue à toutes les nations, comme annoncé par les prophètes et les psaumes (ce que Paul développe dans les versets suivants, v.9-12). - Pères et Réformateurs
Chrysostome voit ici le modèle d’une Église composée de Juifs et de Grecs, réconciliés dans une même louange.
Origène insiste sur la fonction pédagogique de l’Ancien Testament pour les chrétiens.
Augustin souligne que l’unité de l’Église vient de Dieu lui-même, pas seulement de l’effort humain.
Luther et Calvin mettent ce texte en lien avec la justification par la foi : si Juifs et païens sont justifiés de la même manière, ils doivent apprendre à s’accueillir mutuellement. Calvin insiste sur le fait que Christ, en se faisant « serviteur des circoncis », ne nie pas les promesses faites aux pères, mais les confirme en les ouvrant aux nations.
- Lien avec la théologie de l’alliance
Romains 15 confirme que :
il n’y a pas deux peuples de Dieu, mais un seul peuple de l’alliance, composé de Juifs et de païens ;
les promesses faites aux « pères » (Abraham, Isaac, Jacob, David) sont confirmées en Christ ;
les païens entrent dans cette même alliance, non par une nouvelle voie, mais par la miséricorde de Dieu annoncée déjà dans l’Ancien Testament.
Nous avons ici la continuité entre l’ancienne et la nouvelle alliance : même Dieu, même promesse de grâce, même Sauveur, mais extension universelle du peuple de l’alliance.
Matthieu 3.1-12 – La prédication de Jean, charnière des alliances
- Contexte et structure
Nous sommes au début du ministère public de Jésus. Matthieu a présenté sa généalogie (1.1-17), la naissance (1.18-25), puis le séjour en Égypte et le retour (chap. 2). Matthieu 3 introduit Jean-Baptiste, dernier prophète de l’ancienne alliance, qui prépare la venue du Messie.
Structure :
v.1-6 : ministère de Jean dans le désert, prédication et baptême.
v.7-10 : confrontation avec les pharisiens et sadducéens, appel à un fruit digne de la repentance et avertissement du jugement.
v.11-12 : contraste entre le baptême de Jean et celui de « celui qui vient », et annonce du jugement eschatologique.
- Mots grecs importants
« Repentez-vous » : μετανοεῖτε (metanoeite) – litt. changer d’esprit, de mentalité, orientation profonde de la vie ; pas seulement un remords, mais une conversion.
« Le royaume des cieux est proche » : ἤγγικεν ἡ βασιλεία τῶν οὐρανῶν (ēngiken hē basileia tōn ouranōn) – s’est approché, est à portée de main. Chez Matthieu, « des cieux » est une périphrase respectueuse pour « de Dieu ».
« Désert » : ἔρημος (erēmos) – lieu de dépouillement, mais aussi lieu de l’alliance (Exode), rappelant le temps où Dieu préparait son peuple.
« Baptiser » : βαπτίζω (baptizō) – plonger, immerger ; signe de purification et de repentance.
« Race de vipères » : γεννήματα ἐχιδνῶν (gennēmata echidnōn) – rejetons de serpents ; dénonciation prophétique de l’hypocrisie religieuse.
« La colère à venir » : τῆς μελλούσης ὀργῆς (tēs mellousēs orgēs) – jugement eschatologique.
« Fruit digne de la repentance » : καρπὸν ἄξιον τῆς μετανοίας (karpon axion tēs metanoias) – comportements concrets en cohérence avec la conversion intérieure.
« Déjà la cognée est mise à la racine » : ἤδη δὲ ἡ ἀξίνη πρὸς τὴν ῥίζαν τῶν δένδρων κεῖται – urgence du jugement ; pas simplement une menace lointaine.
« Il vous baptisera du Saint-Esprit et de feu » : ἐν Πνεύματι Ἁγίῳ καὶ πυρί (en Pneumati Hagiō kai pyri) – soit une seule réalité (Esprit purifiant comme un feu), soit une double réalité (don de l’Esprit et feu du jugement). Le contexte du v.12 (jugement) incline vers une dimension de discernement et de purification.
« Il a son van à la main » : πτύον (ptyon) – fourche ou van pour vanner le grain.
« Il nettoiera son aire » : διακαθαριεῖ (diakathariei) – purifier entièrement.
« Feu qui ne s’éteint point » : πυρὶ ἀσβέστῳ (pyri asbestos) – feu inextinguible, image du jugement définitif. - Exégèse plus détaillée
v.1-2 : Jean prêche « dans le désert de Judée ». Le désert rappelle l’Exode, l’alliance au Sinaï, le temps où Dieu formait un peuple. Jean place Israël dans une posture de recommencement : il appelle au retour au Seigneur, en vue de l’« approche » du Royaume.
v.3 : Matthieu cite Ésaïe 40.3 : la voix qui prépare le chemin du Seigneur. Ici, le « Seigneur » (YHWH dans l’AT) est appliqué à Jésus : forte implication christologique et d’alliance – le Dieu de l’alliance vient lui-même.
v.4 : Vêtement de poil de chameau, ceinture de cuir, nourriture de sauterelles et miel : Jean rappelle Élie (2 Rois 1.8). Il incarne la continuité prophétique de l’ancienne alliance.
v.5-6 : Le peuple vient confesser ses péchés et se faire baptiser dans le Jourdain. Le lieu n’est pas neutre : le Jourdain est le lieu du passage dans la Terre promise (Josué 3–4). Le baptême de Jean est comme une nouvelle traversée, un renouvellement de l’alliance, mais avec une exigence de repentance intérieure.
v.7-10 :
Jean s’adresse aux pharisiens et sadducéens avec dureté. La « colère à venir » renvoie au jugement annoncé par les prophètes.
Le verset 9 est crucial pour la théologie de l’alliance :
« Dieu peut de ces pierres susciter des enfants à Abraham » :
Jean conteste une compréhension purement généalogique de l’alliance. Être « fils d’Abraham » n’est pas seulement une question de sang, mais de cœur. C’est exactement la ligne que Paul développera (Romains 4 ; Galates 3).
L’image de l’arbre coupé (v.10) renvoie à l’idée de jugement sur un Israël infidèle, et à la distinction entre Israël nominal et Israël réel (le vrai peuple de l’alliance, cf. Romains 9.6).
v.11 :
Jean distingue clairement son baptême de celui du Messie.
« Je vous baptise d’eau, pour vous amener à la repentance » : signe de préparation.
« Celui qui vient après moi… il vous baptisera du Saint-Esprit et de feu » :
Christ apporte la réalité que le signe annonce : l’Esprit lui-même, qui purifie et régénère.
Ici se profile la transition d’une économie d’ombres (rites préparatoires) à la pleine économie de l’Esprit (nouvelle alliance).
v.12 :
Les images du van, de l’aire, du blé et de la paille soulignent le discernement messianique : Christ rassemble son vrai peuple (le blé) et rejette ce qui n’appartient pas réellement à l’alliance (la paille). Le jugement fait partie intégrante de l’établissement du Royaume. - Pères de l’Église et Réformateurs
Les Pères voient Jean comme la charnière entre les deux alliances.
Origène parle de Jean comme « la voix » et du Christ comme « le Verbe » : la voix annonce, le Verbe réalise.
Chrysostome insiste sur la radicalité de la conversion : ce n’est pas la naissance physique (fils d’Abraham) qui sauve, mais la foi active qui produit des fruits.
Augustin voit dans le baptême du Christ (qui suit immédiatement) le signe de la nouvelle alliance, où l’Esprit est donné.
Chez les Réformateurs :
Luther prêche souvent sur « Produisez donc du fruit digne de la repentance », pour dénoncer les faux appuis (œuvres méritoires, appartenance extérieure).
Calvin note que Jean attaque la présomption d’Israël : « Nous avons Abraham pour père ». Il y voit une leçon pour l’Église : ne pas se reposer sur une appartenance externe à la communauté de l’alliance, mais vivre une foi vivante.
Dans une perspective réformée, le baptême chrétien est compris comme signe et sceau de l’alliance de grâce, en continuité avec la circoncision :
– même Dieu,
– même promesse de pardon et de vie,
– mais un signe transformé, plus riche, lié à la venue de l’Esprit.
Jean ouvre cette transition en annonçant celui qui « baptise du Saint-Esprit ».
- Lien avec la théologie de l’alliance
Jean-Baptiste :
est le dernier prophète de l’ancienne alliance,
appelle Israël à un renouvellement de l’alliance dans la repentance,
prépare la venue de celui qui apporte la plénitude de l’alliance (Esprit, Royaume, jugement).
La dénonciation de la confiance dans la descendance d’Abraham annonce la redéfinition du « peuple de l’alliance » : ceux qui croient et se repentent, qu’ils soient Juifs ou non.
Le baptême comme signe de repentance et de purification anticipe le baptême chrétien comme signe d’entrée visible dans l’alliance de grâce, en lien avec Romains 6 et Colossiens 2.11-12.
Thème commun et alliance : convergence des trois textes
Si l’on rapproche Ésaïe 11, Romains 15 et Matthieu 3 :
Ésaïe 11 annonce le Roi de l’alliance, rempli de l’Esprit, qui rétablit la justice et la paix et rassemble les nations.
Matthieu 3 montre Jean qui prépare la venue de ce Roi, appelle à la repentance et annonce le baptême de l’Esprit et du feu, c’est-à-dire l’établissement effectif et décisif de l’alliance renouvelée.
Romains 15 explicite que ce Roi, Christ, est venu :
– confirmer les promesses faites aux pères (fidélité à l’alliance ancienne),
– et ouvrir la miséricorde aux païens (extension universelle de l’alliance de grâce).
En termes de théologie de l’alliance :
continuité : un seul Dieu, une seule promesse de grâce, un seul Messie, un seul peuple (Juifs et nations unis en Christ) ;
discontinuité : la venue du Roi et le don de l’Esprit inaugurent une nouvelle phase de l’alliance, plus universelle, plus intérieure, marquée par la régénération et l’écriture de la loi dans les cœurs.
Prédication : « Préparez le chemin du Roi »
Introduction
Le deuxième dimanche de l’Avent place devant nous la figure de Jean-Baptiste, la voix qui appelle le peuple de Dieu à revenir vers son Seigneur. L’Avent, avant d’être la douce préparation à Noël, est d’abord l’annonce d’une venue qui fait trembler les montagnes et purifier les cœurs. Le Christ vient. Il vient comme le Roi promis par Ésaïe, comme le Serviteur en qui les nations trouveront l’espérance selon Paul. Mais pour accueillir sa venue, il faut un cœur préparé, purifié, converti.
Premier point : Le Roi annoncé et attendu
Ésaïe 11.1-10 dresse le portrait du Roi idéal, issu du modeste « tronc d’Isaï ». Ce Roi, rempli de l’Esprit de l’Éternel, juge avec équité, défend les pauvres, abat le méchant par la seule puissance de sa Parole, et apporte une paix si profonde qu’elle transforme jusqu’à la création elle-même.
La tradition chrétienne a toujours reconnu ici le Messie. Irénée parlait du Christ comme de ce « rejeton qui récapitule en lui l’humanité ». Augustin voyait dans ce passage le royaume du Christ, supérieur à tous les royaumes humains car fondé sur la justice et non sur la force. Calvin soulignait que Dieu met en lumière la faiblesse apparente du Messie pour que sa puissance apparaisse comme purement divine.
Enfin, Ésaïe conclut que ce Roi deviendra une « bannière pour les peuples ». L’alliance se déploie au-delà d’Israël : les nations sont appelées à entrer sous l’autorité du Messie.
Ainsi, avant même d’entendre Jean-Baptiste, nous savons quel Roi s’approche : un Roi juste, rempli de l’Esprit, universel, restaurateur, celui qui établit la paix véritable.
Deuxième point : La préparation nécessaire : la repentance
C’est dans ce contexte que Matthieu présente Jean-Baptiste. Il se tient dans le désert, ce lieu symbolique où Dieu avait formé Israël à l’alliance. Son message est bref, mais tranchant : « Repentez-vous, car le royaume des cieux est proche » (Matthieu 3.2).
Le verbe grec μετανοεῖτε signifie un changement radical de mentalité, une réorientation profonde de la vie. La repentance n’est pas un remords vague : c’est une transformation intérieure qui appelle des fruits visibles.
Jean appelle ainsi le peuple à une conversion concrète, personnelle et communautaire.
Chrysostome remarquait que Jean ne se contente pas de défendre la morale : il annonce un bouleversement spirituel, un appel à une vie nouvelle que seul le cœur renouvelé peut produire.
Lorsque les pharisiens et les sadducéens viennent, Jean dénonce leur présomption : « Nous avons Abraham pour père ». Il rappelle que l’alliance n’est pas une affaire d’héritage charnel, mais de cœur brisé et repentant. Calvin commente : « Ils se glorifiaient d’un titre vide ; Jean les ramène à la réalité de la foi vivante. »
L’image de la cognée au pied de l’arbre (Matthieu 3.10) signifie que le jugement approche. Ce n’est pas une menace lointaine : c’est une urgence spirituelle. L’Avent n’est pas seulement un temps d’attente, mais un temps de décision : se détourner du mal et revenir au Dieu de l’alliance.
Troisième point : Le Roi se révèle, porteur de l’Esprit et du jugement
Jean annonce enfin Celui qui vient : « Il vous baptisera du Saint-Esprit et de feu » (Matthieu 3.11).
Le baptême de Jean était un signe de repentance, comme une préparation. Mais le baptême de Jésus est la réalité elle-même : le don de l’Esprit, la régénération, la vie nouvelle. C’est le passage de l’ancienne alliance, marquée par des rites préparatoires, à la nouvelle alliance, marquée par la puissance de l’Esprit.
Les Pères de l’Église voyaient dans le feu une image de purification. Pour Origène, « le feu du Christ consume ce qui est mort en nous pour faire resplendir ce qui est de Dieu ».
Mais Jean annonce aussi le jugement : Jésus « nettoiera son aire ». L’image du van et de la paille rappelle que le Royaume n’est pas une réalité vague ou sentimentale. Le Roi vient séparer, purifier, juger. L’alliance est une grâce, mais une grâce sanctifiante, qui ne laisse pas l’homme dans son péché.
Ainsi, celui qui vient est à la fois celui qui pardonne et celui qui purifie, celui qui rassemble son peuple et celui qui sépare le vrai du faux. Romains 15 en donne la clé : Jésus est venu « confirmer les promesses faites aux pères » et « pour que les païens glorifient Dieu pour sa miséricorde ».
Autrement dit, le Christ accomplit l’alliance en profondeur : fidélité envers Israël, ouverture aux nations, don de l’Esprit, appel à la sainteté. Le temps du Messie est aussi le temps de l’unité du peuple de Dieu.
Conclusion :
L’Avent n’est donc pas seulement la préparation à une fête, mais la préparation à une venue. Une venue réelle, souveraine, qui secoue nos vies et les purifie. Dieu nous appelle à préparer le chemin du Roi, non en multipliant les décorations, mais en ouvrant nos cœurs à la repentance.
La bonne nouvelle, c’est que ce Roi vient pour restaurer. Il vient pour guérir, pour rassembler, pour donner son Esprit. Il vient pour accomplir l’alliance que Dieu a promise depuis Abraham, renouvelée par les prophètes, et maintenant étendue aux nations.
En ce deuxième dimanche de l’Avent, nous sommes invités à écouter la voix de Jean, à reconnaître notre besoin de conversion, et à relever les yeux vers Celui qui baptise du Saint-Esprit et de feu. Préparons-lui la route, afin que sa venue trouve en nous non des cœurs endurcis, mais des cœurs disponibles, réconciliés, espérant pleinement en la grâce de Dieu.
Culte réformé (textes liturgiques)
Accueil
Que la grâce et la paix vous soient données de la part de Dieu notre Père et du Seigneur Jésus-Christ.
En ce temps de l’Avent, l’Église écoute la voix de Jean-Baptiste : « Préparez le chemin du Seigneur ». Que ce culte soit pour nous un temps de retour vers Dieu, un temps de lumière et d’espérance.
Appel à l’adoration – Ésaïe 40.3, 5
Une voix crie : Dans le désert, préparez le chemin de l’Éternel ; aplanissez dans les lieux arides une route pour notre Dieu.
Alors la gloire de l’Éternel sera révélée, et toute chair ensemble la verra.
Nous nous levons pour chanter.
Cantique d’entrée (proposition)
Arc-en-Ciel 241 : « Peuples, préparez la route »
ou
Psautier (réformé) : Psaume 72 : Revêts, Seigneur (ARC 72) (x5) ou Psaume 24, strophes 1, 3, 5 « Portes, ouvrez vos frontons »
Prière d’ouverture
Éternel, notre Dieu, toi qui viens à ton peuple, toi qui réveilles les cœurs assoupis, nous nous tenons devant toi.
Dissipe ce qui nous distrait, apaise ce qui nous trouble, ouvre nos yeux à ta lumière.
Par ton Esprit, conduis-nous dans la vérité, afin que tout ce qui sera dit et fait en ce lieu glorifie ton Nom.
Par Jésus-Christ notre Seigneur. Amen.
Lecture de la Loi – Romains 13.11-12
Cela importe d’autant plus que vous savez en quel temps nous sommes : c’est l’heure de vous réveiller du sommeil. Rejetons les œuvres des ténèbres, et revêtons les armes de la lumière.
Prière de confession du Péché
Seigneur notre Dieu, toi qui sondes les cœurs, nous reconnaissons devant toi notre lenteur à nous convertir, notre résistance à ta volonté, notre attachement à ce qui n’est pas digne de toi.
Comme Israël autrefois, nous avons souvent mis notre confiance dans de faux appuis.
Pardonne nos manquements, renouvelle-nous par ton Esprit, et rends nos vies conformes aux fruits de la repentance.
Nous te le demandons au nom de Jésus-Christ. Amen.
Annonce du pardon – Ésaïe 55.6-7
Cherchez l’Éternel pendant qu’il se trouve ; invoquez-le tandis qu’il est près. Que le méchant abandonne sa voie et l’homme d’iniquité ses pensées ; qu’il retourne à l’Éternel, qui aura compassion de lui.
C’est sur cette promesse que je vous annonce le pardon de Dieu, au nom du Père, du Fils et du Saint-Esprit.
Cantique de reconnaissance
Arc-en-Ciel 53 : « Mon Rédempteur est vivant »
ou
Psautier 32 : « Heureux celui »
Prière d’illumination avant les lectures
Dieu éternel, tu as donné les Écritures pour notre instruction, afin que, par la patience et la consolation qu’elles apportent, nous possédions l’espérance.
Ouvre maintenant nos cœurs et nos esprits à ta Parole. Par Jésus-Christ. Amen.
Lectures bibliques
Première lecture : Ésaïe 11.1-10
Deuxième lecture : Romains 15.4-9
Évangile : Matthieu 3.1-12
Répons (psaume ou chant bref)
Psautier 85, strophe 2 : « Sa justice marchera devant lui »
Prédication
Thème : « Préparez le chemin du Roi »
(Prédication déjà rédigée dans le message précédent)
Cantique après la prédication
Arc-en-Ciel 243 : « Jésus, que ton règne arrive »
ou
Psautier 85 : « Fais-nous voir, Seigneur, ta bonté »
Confession de foi (Symbole des Apôtres)
Je crois en Dieu, le Père tout-puissant, créateur du ciel et de la terre…
Intercession
Seigneur notre Dieu, nous te prions pour ton Église répandue dans le monde : qu’elle soit fidèle dans la proclamation de l’Évangile et dans l’attente de ton retour.
Nous te prions pour les autorités de notre pays, pour celles et ceux qui exercent des responsabilités : accorde-leur sagesse, justice et compassion.
Nous te prions pour les malades, les affligés, les exilés, ceux qui traversent des combats intérieurs : que ta lumière les visite et les relève.
Nous te prions pour nos familles, nos amis, nos communautés : que la puissance de ton Esprit renouvèle notre amour et notre patience.
Enfin, nous te prions pour nous-mêmes : rends-nous vigilants, fervents, et remplis d’espérance.
Par Jésus-Christ, notre Seigneur.
Notre Père
Notre Père qui es aux cieux…
Offrande
Que chacun donne comme il l’a résolu en son cœur, non avec regret ni contrainte, car Dieu aime celui qui donne avec joie.
Cantique final
Arc-en-Ciel 261 : « Voici que l’aube pointe »
ou
Psautier 98 : « Chantez au Seigneur un cantique nouveau »
Envoi et bénédiction – Romains 15.13
Que le Dieu de l’espérance vous remplisse de toute joie et de toute paix dans la foi, afin que vous abondiez en espérance, par la puissance du Saint-Esprit.
Allons dans la paix du Seigneur.

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