Psaume 72 (ChatGPT)

Psaume 72 : Revêts, Seigneur (ARC 72) (x5)

Catégories : Psaume particulièrement approprié aux temps d’Avent, de mission et de louange.

Le Psaume 72, tel qu’il est chanté dans le Psautier de Genève, présente la figure du Roi idéal établi par Dieu : un souverain qui reçoit de lui la justice, protège les pauvres, brise l’oppresseur et fait fleurir la paix sur toute la terre. Dans la tradition réformée, ce portrait dépasse largement les rois d’Israël et annonce le règne messianique du Christ, Roi de justice et de paix. Chanté avec sa mélodie noble et solennelle du XVIe siècle, ce psaume exprime l’espérance d’un monde rétabli sous le gouvernement divin et nourrit l’attente du Royaume. Il demeure ainsi un chant majeur de la piété réformée, particulièrement approprié aux temps de l’Avent, de mission et de louange.


Audio

Accompagnement avec intro (Union Chapel Organ) (x5)
Accompagnement avec intro (Hautbois) (x5)

Libre interprétation (Suno AI)


Paroles

1. Revêts, Seigneur, de ta justice
Le Prince de la paix
Et parmi nous qu’il établisse
Son royaume à jamais.
En lui, les plus humbles du peuple
Trouvent un défenseur,
Délivrant les fils de la veuve
Et brisant l’oppresseur.

2. Qu’il règne sur toute la terre,
Sur tous les océans,
Tant que le soleil les éclaire
Jusqu’à la fin des temps.
Des sommets qu’il fasse descendre
La paix et la bonté,
Sur les coteaux qu’il vienne étendre
Le droit et l’équité.

3. Comme l’ondée il renouvelle,
Il reverdit nos prés.
Il donne au droit vigueur nouvelle ;
Le monde en est paré.
Dans son royaume sans frontières
Les grands s‘inclineront ;
Et tous les peuples qu’il libère
En paix le serviront.

4. Il est l’appui dans leur détresse
Des plus abandonnés.
Sa main guérit, son bras redresse
Le faible méprisé.
Il vient sauver dans son épreuve
L’esprit du malheureux ;
Plus que le sien, le sang du pauvre
A du prix à ses yeux.

5. Vive ton roi ! Que l’on bénisse
Et glorifie son nom.
Que l’or afflue pour sa justice
De tous les horizons.
Les blés croîtront en abondance
Jusqu’au sommet des monts ;
Tous verront la magnificence
Des jardins de Sion.


Analyse

Le Psaume 72, dans la tradition réformée et son versant chanté du Psautier de Genève, est un psaume royal messianique. Il décrit le règne idéal du Roi choisi par Dieu, un règne fondé sur la justice, la paix, la protection des faibles et la prospérité du peuple. Dans la lecture chrétienne, ce roi idéal préfigure le Christ, Roi de justice et de paix, devant qui les nations se prosternent. Le texte souligne la compassion du Roi pour les pauvres et les opprimés, ainsi que l’universalité de son règne. Chanté dans le culte réformé, ce psaume nourrit l’espérance d’un monde rétabli selon l’ordre divin et annonce la venue du Messie, accomplie en Christ et encore attendue dans sa plénitude lors de la Parousie.

Mélodie – Psautier de Genève (indications textuelles)
Mode : mélodie du Psautier de Genève (1551), tonalité modale typique du chant réformé.
Forme : AAB (forme bar form), comme la plupart des mélodies genevoises.
Ambitus : une octave.
Caractère : noble, solennel, posé, invitant à la contemplation du règne juste et pacifique du Messie.

Si tu veux la partition en notation moderne, je peux la recréer pour toi.

Analyse théologique du Psaume 72
Le Psaume 72 appartient à la catégorie des psaumes royaux. Dans la tradition juive, il est lié au règne de Salomon. Dans la tradition chrétienne, il annonce le règne du Messie, le Roi parfait que Dieu établit pour gouverner avec justice.
Trois grandes idées dominent le texte.

  1. Le règne fondé sur la justice. Le Roi reçoit la justice de Dieu lui-même. La justice n’est pas une création humaine mais un don divin. Elle protège les pauvres, les opprimés et les faibles, montrant que la véritable autorité royale est une autorité de service.
  2. La paix messianique pour toute la création. La bénédiction de ce Roi s’étend comme la pluie sur l’herbe desséchée : elle apporte vie, paix profonde, harmonie et prospérité. La théologie chrétienne voit ici une anticipation du règne du Christ, Prince de la paix.
  3. L’universalité du règne. Les rois des nations viennent se prosterner. Universalisme prophétique : toutes les nations reconnaissent l’autorité du Messie. C’est un texte eschatologique qui nourrit l’espérance de la Parousie.

Lecture chrétienne du Psaume 72 en lien avec l’Avent
Dans l’Avent, l’Église attend la venue du Roi. Le Psaume 72 donne un portrait de ce Roi attendu : juste, pacificateur, proche des pauvres. Il annonce la venue du Christ à Noël, mais surtout son retour glorieux. C’est pourquoi ce psaume figure souvent dans les liturgies d’attente du Royaume.

Usage liturgique traditionnel
Le Psaume 72 est souvent chanté :
• pendant l’Avent
• lors de cultes marquant une installation, une bénédiction ou une demande de sagesse pour les autorités
• pour exprimer l’espérance du règne de Dieu sur la terre
• lors de célébrations missionnaires, en raison de son universalisme
Dans la liturgie réformée, il ouvre volontiers un culte d’espérance ou accompagne une prédication sur le Royaume.

Introduction liturgique proposée
« Frères et sœurs, en ce temps où nous attendons le Roi de gloire, nous faisons monter vers Dieu ce chant ancien. Le Psaume 72 est une prière adressée à Dieu pour que son Roi gouverne avec justice, qu’il relève les pauvres, qu’il fasse fleurir la paix, et que toutes les nations reconnaissent son Nom. En Christ, ce Roi nous est donné. Nous chantons ce psaume pour nous ouvrir à son règne et pour attendre sa venue dans la joie et la confiance. »


Exégèse verset par verset, version Louis Segond (1910)

Verset 1
« O Dieu, donne tes jugements au roi, Et ta justice au fils du roi ! »

• Contexte : probablement une prière pour le couronnement ou le règne de Salomon, mais avec une portée qui dépasse de loin tout roi humain.
• « Tes jugements » = hébreu mishpatim (מִשְׁפָּטִים) : décisions, sentences, droit conforme à la volonté de Dieu, pas seulement des règles abstraites.
• « Ta justice » = tsedaqah (צְדָקָה) : justice droite, fidélité à l’alliance, droiture morale et relationnelle.
Le roi n’invente pas sa propre norme, il reçoit la justice de Dieu.

• Pères de l’Église : Augustin voit ici directement le Christ, Roi auquel le Père confie ses jugements, afin qu’il exerce le jugement au dernier jour et gouverne son Église dès maintenant.
• Réformateurs : Calvin souligne que le roi légitime doit être « ministre de la justice de Dieu », non pas tyran. Mais comme aucun roi terrestre n’a réellement accompli ce portrait, il conclut que « ce Psaume doit être rapporté au Christ ».

Verset 2
« Il jugera ton peuple avec justice, Et tes malheureux avec équité. »

• « Jugera » = shafat (שָׁפַט) : gouverner en rendant justice, non seulement prononcer des verdicts mais ordonner la vie du peuple.
• « Malheureux » : terme proche de ani / anaw (עָנִי / עָנָו), les humbles, pauvres, affligés.
• « Équité » = encore l’idée de droiture : pas de favoritisme, même les vulnérables sont entendus.

• Patristique : pour Chrysostome, ce verset décrit la douceur du Christ envers les humbles et son jugement sévère contre les oppresseurs.
• Réformateurs : Luther insiste sur le fait que le Christ défend « les pauvres en esprit » (Matthieu 5.3), ceux qui n’ont aucun mérite à faire valoir.

Verset 3
« Les montagnes porteront la paix pour le peuple, Et les collines aussi, par l’effet de ta justice. »

• Image poétique : les montagnes et collines représentent tout le pays, du plus élevé au plus humble.
• « Porteront la paix » : shalom (שָׁלוֹם) = paix, plénitude, prospérité, harmonie dans toutes les relations.
• La paix est le fruit de la justice : la stabilité et la prospérité viennent d’un ordre juste, pas simplement de l’absence de guerre.

• Augustin : les « montagnes » représentent les apôtres et les grands docteurs qui portent la paix de Christ au peuple.
• Calvin y voit un signe de bénédiction globale : même les zones les moins fertiles participent à la fécondité sous le règne juste du roi.

Verset 4
« Il fera droit aux malheureux du peuple, Il sauvera les enfants du pauvre, Et il écrasera l’oppresseur. »

• « Malheureux » : encore l’idée des dal (דַּל) et evyon (אֶבְיוֹן), les faibles, les indigents.
• « Sauvera » = yoshia‘ (יוֹשִׁיעַ), même racine que « Jésus » (Yeshoua‘) : sauver, délivrer.
• « Écrasera l’oppresseur » = dakak / ratzats : briser, réduire en poussière. Le règne messianique n’est pas neutre ; il détruit l’injustice.

• Pères : pour Athanase, ce verset manifeste la compassion du Christ qui secourt les pauvres et renverse les puissances injustes.
• Réformateurs : Bucer souligne la dimension sociale : un gouvernement juste doit réellement protéger les faibles et contenir les tyrans. Appliqué au Christ, cela devient promesse de son jugement final sur toutes les oppressions.

Verset 5
« On te craindra, tant que subsistera le soleil, Tant que la lune brillera, de génération en génération. »

• La « crainte » = yir’ah (יִרְאָה) : respect, adoration, conscience de la grandeur de Dieu.
• La durée « tant que le soleil et la lune » indique un règne qui dépasse la durée d’un seul roi : perspective éternelle.

• Augustin : seul le Christ peut être craint « tant que le soleil durera » ; les rois terrestres passent, lui non.
• Calvin : le langage hyperbolique montre que le psaume vise au-delà de Salomon, vers un règne perpétuel.

Verset 6
« Il sera comme une pluie qui tombe sur un terrain fauché, Comme des ondées qui arrosent la campagne. »

• Image : la pluie douce après la coupe du foin ou la moisson : rafraîchissement, renouvellement, fécondité.
• « Pluie » = geshem (גֶּשֶׁם), « ondées » = r’vivim (רְבִיבִים), pluies abondantes mais bienfaisantes.

• Pères : Origène voit dans la pluie la grâce de la Parole du Christ qui descend sur les cœurs « fauchés » par la Loi pour les faire reverdir.
• Luther : le règne du Christ n’est pas imposé par la force des armes mais par la douceur de l’Évangile, comme une pluie qui pénètre la terre.

Verset 7
« En ses jours le juste fleurira, Et la paix sera grande jusqu’à ce qu’il n’y ait plus de lune. »

• « Juste » = tsaddiq (צַדִּיק) : celui qui vit dans l’alliance, droit devant Dieu. Sous ce Roi, les justes ne sont plus écrasés, ils s’épanouissent.
• « Fleurira » : idée de croissance, de prospérité (comme une plante qui s’épanouit).
• « Paix sera grande » = rov shalom (רֹב שָׁלוֹם) : abondance de paix, surabondance.

• Augustin : les « justes » qui fleurissent sont les saints, nourris par la grâce de Christ.
• Calvin : le règne de Christ fait prospérer la justice, même lorsque le monde semble hostile ; l’accomplissement total est eschatologique.

Verset 8
« Il dominera d’une mer à l’autre, Et du fleuve aux extrémités de la terre. »

• « Dominera » = yerdé (descendre régner, parfois « dominer ») : autorité, souveraineté.
• « D’une mer à l’autre » : probablement de la Méditerranée à une autre mer (symbolique d’un règne universel).
• « Du fleuve » = l’Euphrate, limite orientale du pays promis, jusqu’« aux extrémités de la terre ».

• Pères : ce verset est lu comme une prophétie de la catholicité de l’Église : le Christ règne sur toutes les nations.
• Réformateurs : Luther y voit la diffusion de l’Évangile jusqu’aux confins du monde ; Calvin parle d’un règne « spirituel » qui s’étend partout où l’Évangile est reçu.

Verset 9
« Devant lui les habitants du désert fléchiront le genou, Et ses ennemis lécheront la poussière. »

• « Habitants du désert » = nomades, peuples lointains et rudes, réputés indépendants.
• « Fléchiront le genou » : geste d’adoration et de soumission.
• « Lécheront la poussière » : image forte de la défaite totale de ses ennemis (cf. Genèse 3.14 pour le serpent).

• Augustin : tous les ennemis du Christ, visibles et invisibles, seront finalement soumis.
• Calvin : les puissances hostiles, aussi farouches soient-elles, ne peuvent résister au Roi messianique.

Verset 10
« Les rois de Tarsis et des îles paieront des tributs, Les rois de Séba et de Saba offriront des présents. »

• « Tarsis » : probablement un port lointain de l’Occident (souvent associé à l’Espagne).
• « Les îles » : les terres au-delà de la mer, les nations lointaines.
• « Séba » et « Saba » : régions riches du sud (Arabie, Éthiopie).
Les nations les plus lointaines et opulentes rendent hommage au Roi.

• Pères : ils y voient une préfiguration des mages venant d’Orient offrir des présents à Jésus (Matthieu 2).
• Réformateurs : le Christ est reconnu même par les puissances de ce monde, non parce qu’il cherche leur gloire, mais parce que sa gloire les surpasse.

Verset 11
« Tous les rois se prosterneront devant lui, Toutes les nations le serviront. »

• Formule d’universalité : pas seulement Israël, mais tous les peuples.
• « Se prosterneront » = hishtachavah : adorer, se mettre à terre devant un souverain, mais dans la Bible, ce geste appartient ultimement à Dieu.

• Les Pères insistent : si les rois adorent ce Roi, c’est qu’il n’est pas un roi comme les autres, mais Dieu-Fils fait homme.
• Calvin : ce verset ne peut trouver sa pleine réalisation que dans le règne de Christ, proclamé Seigneur de tous (Philippiens 2.9-11).

Versets 12-14
« Car il délivrera le pauvre qui crie, Et le malheureux qui n’a point d’aide.
Il aura pitié du misérable et de l’indigent, Et il sauvera la vie des pauvres ;
Il les affranchira de l’oppression et de la violence, Et leur sang aura du prix à ses yeux. »

• Vocabulaire des pauvres : ani, evyon, dal — la gamme entière des vulnérables : économiquement, socialement, parfois spirituellement.
• « Délivrera » et « sauvera » renvoient à l’action de Dieu comme libérateur de l’Exode.
• « Leurs sang aura du prix » = Dieu ne considère pas leur vie comme négligeable ; il jugera ceux qui la méprisent.

• Pères : Christ est présenté comme le « Samaritain » de tous les pauvres ; certains relient ce passage à Luc 4.18, où Jésus annonce qu’il est venu pour les captifs et les opprimés.
• Réformateurs : Luther lit aussi ces versets dans un sens spirituel : les pauvres sont ceux qui connaissent leur misère devant Dieu ; mais Calvin maintient aussi le sens concret : Dieu prend parti pour les opprimés.

Verset 15
« Ils vivront, et lui donneront de l’or de Séba ; Ils prieront pour lui sans cesse, ils le béniront chaque jour. »

• « Ils vivront » : sous son règne, la vie est protégée et prolongée.
• « Or de Séba » : signe d’hommage royal et de reconnaissance volontaire (pas un tribut forcé seulement).
• « Prieront pour lui » : dans la perspective messianique, ce langage se renverse : l’Église bénit le Christ, le loue sans cesse.

• Augustin remarque que le Christ n’a pas besoin qu’on prie pour lui, mais que la louange continuelle est ici exprimée dans le langage humain des rois.
• Calvin : ce verset évoque la ferveur de la piété sous le règne du Messie, où le peuple est « enflammé en prières et en louanges ».

Verset 16
« Les blés abonderont dans le pays, au sommet des montagnes, Et les épis s’agiteront comme les arbres du Liban ; Les hommes fleuriront dans les villes comme l’herbe de la terre. »

• Bénédiction matérielle : abondance de blé même « sur les sommets » normalement peu fertiles.
• Le Liban, célèbre pour ses cèdres, symbolise la vigueur et la beauté.
• La prospérité des récoltes et la multiplication des hommes manifestent la bénédiction de Dieu.

• Pères : ils y voient l’abondance spirituelle de la grâce et des conversions : les « blés » sont les croyants, moisson du Christ.
• Réformateurs : Calvin admet le sens littéral de prospérité, mais y voit surtout une image de la fécondité de l’Évangile.

Verset 17
« Son nom subsistera toujours, Aussi longtemps que le soleil ; Son nom se propagera de père en fils ; On se bénira l’un l’autre par lui, Toutes les nations le diront heureux. »

• « Son nom » = sa personne révélée, son caractère.
• « Subsistera toujours » : permanence, éternité.
• « On se bénira l’un l’autre par lui » : allusion à la promesse faite à Abraham (Genèse 12.3) : « toutes les familles de la terre seront bénies en toi ». Ici, cette promesse se concentre sur le Roi messianique.

• Augustin : ce verset est un des plus clairs pour affirmer que le Psaume parle du Christ, en qui s’accomplit la bénédiction d’Abraham.
• Calvin : il souligne la continuité de l’alliance : la promesse à Abraham est accomplie en Christ, et toutes les nations trouvent en lui seule la véritable bénédiction.

Verset 18
« Béni soit l’Éternel Dieu, le Dieu d’Israël, qui seul fait des prodiges ! »

• Doxologie : le regard se tourne du roi vers Dieu qui donne ce Roi.
• « Prodiges » = nifle’ot (נִפְלָאוֹת) : actes extraordinaires, œuvres de salut (Exode, etc.).

• Pères et Réformateurs : ce verset rappelle que toute gloire du roi doit finalement être renvoyée à Dieu. Le Christ lui-même, en tant qu’homme, renvoie tout au Père.

Verset 19
« Béni soit à jamais son nom glorieux ! Que toute la terre soit remplie de sa gloire ! Amen ! Amen ! »

• Insistance : pour toujours, et sur toute la terre.
• La prière rejoint les grandes visions prophétiques (Esaïe 6.3 ; Habacuc 2.14) : la terre remplie de la gloire de l’Éternel.

• Augustin : cet Amen double est le soupir de l’Église qui désire l’accomplissement de ce règne glorieux.
• Calvin : la prière pour que la terre soit remplie de la gloire de Dieu est au cœur de toute piété réformée : « Soli Deo Gloria ».

Verset 20
« Fin des prières de David, fils d’Isaï. »

• Note éditoriale qui conclut le deuxième livre des Psaumes (Psaumes 42–72).
• Même si le Psaume est « De Salomon » (titre du verset 1), il est placé dans la collection davidique : cela souligne la continuité entre David, Salomon et la lignée messianique.

• Les Pères y voient l’achèvement d’une étape de la révélation : la royauté davidique atteint ici son sommet prophétique en annonçant le Christ.
• Les Réformateurs se servent de cette inscription pour rappeler que toutes ces « prières de David » convergent vers Jésus, le « fils de David » (Matthieu 1.1 ; 22.41-45).


Synthèse théologique

Le Psaume 72 constitue l’un des sommets théologiques du Psautier. Sous l’apparence d’une prière pour le règne de Salomon, il déploie une vision royale qui dépasse toute monarchie humaine et ouvre directement à la compréhension chrétienne du règne messianique. Trois axes principaux structurent la théologie du texte : la justice divine confiée au Roi, la paix messianique qui en découle, et l’universalité eschatologique de son règne.

1. La justice comme fondement du règne messianique
Le Roi du Psaume 72 ne règne pas selon sa propre sagesse. Il reçoit de Dieu ses mishpatim (jugements) et sa tsedaqah (justice). Cette justice, dans l’Ancien Testament, n’est jamais une simple conformité à une norme abstraite : elle exprime la fidélité à l’alliance, la droiture qui protège les faibles et rétablit l’ordre voulu par Dieu. Le Roi est ainsi le ministre de la justice divine. Les Pères de l’Église, notamment Augustin et Chrysostome, discernent immédiatement ici le Christ, à qui le Père confie le jugement et par qui il gouverne son peuple. Les Réformateurs, Calvin en tête, soulignent que nul roi terrestre n’a jamais exercé une justice parfaite telle que décrite ; le texte renvoie donc nécessairement au Christ. Le Messie est le Roi juste par excellence : il défend les pauvres, brise l’oppresseur, et sa justice donne à la création entière sa vraie stabilité.

2. La paix comme fruit direct de la justice
La paix du Psaume 72 n’est pas la simple absence de conflit ; elle est shalom : plénitude, harmonie, prospérité, vie réconciliée. Les montagnes et les collines « portent la paix », image d’un pays où le règne de Dieu transforme jusqu’aux réalités les plus inertes. La métaphore de la pluie qui descend doucement sur l’herbe fauchée décrit la douceur de la grâce messianique. Le règne du Christ apporte le renouvellement spirituel, la croissance des justes, et une paix qui s’étend « aussi longtemps que la lune ». Dans la tradition chrétienne, ce passage nourrit fortement l’espérance eschatologique : sous le règne du Christ glorifié, la paix sera totale et ininterrompue. Les Pères interprètent volontiers ces images comme la descente de la Parole sur les croyants, tandis que Luther y voit l’action de l’Évangile qui pénètre les cœurs sans violence.

3. L’universalité et la dimension eschatologique du règne
Le Psaume 72 annonce un règne « d’une mer à l’autre », devant lequel même les peuples les plus lointains, les plus indépendants ou les plus puissants se prosternent. Les nations offrent leurs présents, les rois se soumettent, les ennemis sont neutralisés. L’horizon n’est plus celui d’Israël seulement, mais celui du monde entier. Ce motif prépare directement la théologie paulinienne de la catholicité de l’Église : en Christ, toutes les nations sont appelées. Le verset 17 reprend explicitement la bénédiction d’Abraham : « En ta descendance seront bénies toutes les nations ». Le Messie, descendant de David, accomplit cette promesse et devient la source universelle de bénédiction. L’universalité n’est pas seulement géographique mais spirituelle : tous les peuples, unis par la foi, reconnaissent en lui le Roi légitime. Les Réformateurs y voient le fondement théologique de la mission : la prédication de l’Évangile est la manière dont le règne de Christ s’étend jusqu’aux extrémités de la terre.

4. La compassion royale : cœur du règne messianique
Un des traits les plus marquants de ce psaume est la sollicitude du Roi envers les pauvres, les humbles, les opprimés. Il les délivre, les protège, les sauve. Leur sang « a du prix à ses yeux ». Cette affirmation a marqué aussi bien les Pères que les Réformateurs : elle révèle que le Messie ne règne pas principalement par la force, mais par la miséricorde. Le Christ exerce une royauté diaconale : il élève les faibles, guérit les brisés de cœur, délivre les captifs. À l’encontre des rois de la terre, souvent violents ou indifférents, le Messie est un Roi compatissant. Cette compassion n’est pas sentimentale : elle fonde une justice active et une paix véritable. Spirituellement, les Pères y voient l’œuvre du Christ en faveur des pauvres en esprit ; concrètement, Calvin insiste sur la dimension sociale d’un gouvernement juste qui reflète quelque chose du règne de Dieu.

5. Une vision du Royaume qui culmine en doxologie
Le Psaume s’achève sur une double bénédiction : « Béni soit l’Éternel… Amen ! Amen ! ». La théologie du Psaume 72 est résolument théocentrique : Dieu seul fait des prodiges, Dieu seul établit son Roi, Dieu seul accomplit l’espérance messianique. Le Psaume se clôt comme une liturgie, invitant toute la création à rendre gloire à Dieu. La vision du Royaume conduit donc au culte, à l’adoration, à la reconnaissance. Le règne messianique n’est pas une utopie politique, mais la manifestation de la gloire de Dieu sur la terre.

Conclusion générale
Le Psaume 72 offre une théologie complète du Messie :
• Roi juste, recevant la justice de Dieu ;
• Roi pacificateur, apportant une paix profonde ;
• Roi universel, reconnu par toutes les nations ;
• Roi compatissant, défenseur des pauvres ;
• Roi glorieux, dont le règne conduit à la louange.

Dans la lecture chrétienne, ce portrait trouve son accomplissement parfait en Jésus-Christ, Roi humble dans son incarnation, Roi serviteur durant son ministère, et Roi glorifié lors de sa résurrection et de son retour. Le Psaume 72 est ainsi un texte majeur pour comprendre la royauté du Christ, pour nourrir l’espérance de l’Avent et pour orienter le cœur du croyant vers la venue du Royaume de Dieu en plénitude.

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