Jean Calvin, L’Institution de la religion chrétienne, Livre 4.8.9 :
« Voici, clairement énoncé, le pouvoir qui doit être attribué aux pasteurs de l’Église, de quelque nom qu’ils soient appelés : par la Parole de Dieu, dont ils sont les dispensateurs, ils doivent oser toute chose et contraindre toute gloire, toute grandeur et toute puissance de ce monde à plier devant la majesté de Dieu.
Par cette Parole ils auront autorité sur le monde entier, ils édifieront la maison du Christ, renverseront le règne de Satan ;
– ils feront paître les brebis et extermineront les loups ;
– par leurs enseignements et leurs exhortations, ils conduiront ceux qui sont dociles ;
– ils contraindront et corrigeront les rebelles et les obstinés ;
– ils auront le pouvoir de lier et de délier, de tonner et de foudroyer si c’est nécessaire, le tout dans la soumission à la Parole de Dieu.
Cependant entre les apôtres et leurs successeurs il y a, comme je l’ai dit, cette différence que les apôtres ont été comme les notaires assermentés du Saint-Esprit pour garantir l’authenticité des Écritures, tandis que leurs successeurs n’ont que la charge d’enseigner ce qu’ils y trouvent contenu.
Concluons donc en disant qu’il n’est pas permis aux ministres fidèles de forger quelque nouvel article de foi ; ils doivent simplement adhérer à la doctrine à laquelle Dieu nous a tous assujettis sans exception.
Voir de-même :
LIVRE 4 : La sainte Église universelle
Chapitre 3 : Le gouvernement de l’Église
Les responsables des Églises
4 Parlant de ceux qui ont mission de conduire l’Église pour la conformer à l’ordre du Christ, saint Paul cite d’abord les apôtres, puis les prophètes, les évangélistes, les pasteurs et enfin les docteurs (cf. Ep 4, 11). Mais parmi eux, deux seulement sont normalement nécessaires à l’Église chrétienne. Les autres ont été suscités par la grâce de Dieu dans les premiers temps, c’est-à-dire quand l’Évangile commença d’être prêché, bien qu’il arrive encore qu’il les suscite quand la nécessité l’exige. La nature de la fonction des apôtres ressort clairement du commandement qui leur a été fait : allez prêcher l’Évangile à toute créature (cf. Mc 16, 15). Le Seigneur n’assigne pas de limites à chacun, mais donne l’ordre à tous de ranger le monde entier sous son obéissance et d’exalter son règne en répandant a semence de l’Évangile partout où ils le pourront. (…) Les apôtres ont donc été envoyés pour ramener le monde de la révolte où il était à l’obéissance envers Dieu, et pour édifier partout son règne par la prédication de l’Évangile, ou si l’on préfère, pour poser dans tout le monde les fondations de l’Église, dont ils étaient ainsi les principaux et les premiers maîtres d’œuvre. Saint Paul appelle les prophètes non pas indifféremment tous ceux qui annoncent la volonté de Dieu, mais ceux qui ont reçu une révélation particulière que n’ont pas reçue les autres (Ep 2, 20). Or, il n’ y en a pas aujourd’hui, ou alors, on ne les connaît plus. Par évangélistes, j’entends ceux qui avaient une fonction analogue à celle des apôtres, mais qui étaient inférieurs en dignité, comme Luc, Timothée, Tite et les autres. Nous pourrions peut-être mettre dans cette catégorie les soixante-dix disciples que Jésus-Christ a choisi pour occuper le second rang dans les apôtres (cf. Lc 10, 1). Si l’on admet cette interprétation, qui semble être celle de Paul, ces trois fonctions n’ont pas été instituées à titre permanent, mais seulement pour le temps où il fallait dresser des Églises là où il n’en existait pas, et où il fallait annoncer Jésus-Christ aux juifs afin de les amener à leur rédempteur. Mais je ne nie pas que Dieu ait encore suscité depuis lors des apôtres ou des évangélistes où il fallait, comme nous voyons qu’il l’a fait de notre temps. Car les uns et les autres étaient nécessaires pour ramener au droit chemin le pauvre peuple qui s’était fourvoyé. Je dis cependant que cette fonction a un caractère exceptionnel, car elle n’a pas lieu d’exister là où les Églises sont dûment constituées. Paul parle enfin des docteurs et des pasteurs dont l’Église ne peut à aucun moment se passer. La différence entre ces deux fonctions me paraît être que les docteurs n’ont pas la charge de la discipline, ni de l’administration des sacrements, ni des exhortations ou des remontrances. Ils se bornent à exposer l’Écriture, afin qu’une doctrine pure et saine soit toujours maintenue dans l’Église, tandis que la fonction des pasteurs comporte toutes les charges du ministère. (…)
6 En envoyant ses apôtres, notre Seigneur leur commanda, ainsi que nous l’avons rappelé, de prêcher l’Évangile et de baptiser tous les croyants pour la rémission des péchés (cf. Mt 28, 19). Auparavant, il leur avait ordonné de distribuer selon son exemple le sacrement de son corps et de son sang (cf. Lc 22, 19). Il y a là une voie inviolable qui s’impose à tous ceux qui se disent successeurs des apôtres, et qu’ils doivent observer à perpétuité : ils ont à prêcher l’Évangile et à administrer les sacrements. J’en conclus que ceux qui négligent l’une et l’autre obligations prétendent faussement remplir une fonction apostolique.
Que dire alors des pasteurs ? Saint Paul ne parle pas de lui-même, mais d’eux tous quand il dit : « Qu’on nous considère comme des serviteurs du Christ et des intendants des mystères de Dieu » (1 Co 4, 1). De même, dans un autre passage, il ajoute qu’il faut qu’un évêque observe fidèlement la doctrine de vérité, afin qu’il puisse exhorter le peuple par une saine doctrine et réfuter les contradicteurs (cf. Ti 1, 9). De ces deux affirmations, et de nombreuses autres semblables, nous pouvons conclure que les pasteurs exercent une double fonction : ils annoncent l’Évangile et administrent les sacrements. Or l’enseignement ne consiste pas seulement dans la prédication publique, mais aussi dans les exhortations particulières. (…)
8 En appelant indifféremment les responsables de l’Église évêques, prêtres, pasteurs et ministres, je me conforme à l’Écriture dans laquelle ces mots sont synonymes. (….) Ceux qu’elle appelle gouverneurs sont les anciens qu’on élisait parmi l’assemblée pour aider les évêques dans leurs exhortations et maintenir l’ordre dans l’Église. Au commencement chaque Église a donc eu un conseil, ou consistoire, de bons prud’hommes pieux qui avaient pour attribution de corriger les vices. (…)
9 L’assistance aux pauvres était confiée aux diacres, parmi lesquels Paul, dans l’épître aux Romains, distingue deux catégories : Que celui qui donne, dit-il, le fasse avec simplicité que celui qui exerce la miséricorde le fasse avec joie (Rm 12). Comme il est certain qu’il parle des fonctions officielles qui existent dans l’Église, nous voyons qu’il y avait deux sortes de diacres. Ou je me trompe fort, ou la première formule désigne les diacres qui administraient les aumônes, et la seconde ceux qui avaient la charge de soigner les pauvres et de les servir, comme le faisaient les veuves dont Paul parle à Timothée (cf. 1 Tim 5, 10).
Chapitre 8 : L’autorité de l’Église
La doctrine et la Parole
8 Nous conclurons donc fermement que nous ne devons, dans l’Église, tenir pour Parole de Dieu que ce qui est contenu dans la Loi et les Prophètes, puis dans les Écrits des Apôtres, et qu’il n’y a pas d’autre façon d’enseigner droitement que de soumettre tout enseignement à cette règle.
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